La chanteuse de jazz Molly Johnson vient de sortir l'album 'Luky'. Elle répond à nos questions sur sa vie d'artiste, de femme socialement engagée, de métisse canadienne face à l'élection de Barack Obama à la tête des Etats-Unis.
Comment vous est venue cette vocation de chanteuse ?
J'ai commencé ma carrière à l'âge de 5 ans, sur la scène de comédies musicales comme « Porgy and Bess ». Nous habitions dans la même rue qu'un célèbre producteur de spectacle, il m'a repérée et m'a proposé un rôle. C'était une chance inouïe.
Et vous savez, il est difficile de faire autre chose quand on a goûté au spectacle... Par conséquent, cette vocation s'est en quelque sorte imposée à moi. Mais je dois reconnaître que je prends énormément de plaisir à échanger avec le public, à communiquer avec les gens, et que ce métier m'offre une chance incroyable de pouvoir le faire. Je n'échangerais ma place avec personne, pour rien au monde (rires).
Quel a été votre parcours dans ce domaine ?
J'ai pratiqué beaucoup de genres musicaux et mené beaucoup de projets différents, mais les deux principaux furent avec mes groupes Alta Moda puis The Infidels. Aujourd'hui, c'est dans un répertoire acoustique et jazz que je me sens vraiment à l'aise.
Vos origines familiales ont-elles influencé vos choix dans les chansons que vous interprétez, que vous composez ?
Oui bien sûr, j'ai besoin de nourrir mon interprétation et mon écriture de tout ce qui fait ma vie, mon expérience, ma maturité. Mes origines familiales sont très marquantes en cela, car je suis née d'une mère blanche et d'un père noir à une époque où ce type d'union était illégal
*Molly Johson est née à Toronto dans les années 60 d'un père et d'une mère américains.
. Ça marque un destin, vous savez... heureusement, les temps ont changé. Beaucoup changé.
Ce goût du jazz ? D'où vous vient-il ? De quelles influences ?
Mon père écoutait beaucoup de musique américaine, de standards de jazz. Ces chansons que je chante aujourd'hui ont bercé mon enfance, au même titre qu'elles bercent l'inconscient collectif.
Le jazz permet une grande liberté d'interprétation, et c'est ce qui m'intéresse le plus aujourd'hui : interpréter. Mais cela nécessite une certaine maturité pour que cela ait un sens, que les paroles prennent toute leur valeur. C'est la raison pour laquelle j'ai attendu de me sentir prête avant de me lancer dans le jazz.
Pensez-vous élargir votre palette vers d'autres types d'interprétations ? Seule, avec d'autres artistes, venant de différents horizons ?
Oui pourquoi pas, mais pour le moment j'essaie de me concentrer sur mon album
*Le dernier album de Molly Johnson 'Lucky' est sorti chez
Universal Music en novembre 2008
et mon formidable trio.
* Lors de son concert unique à Paris, le 11 février dernier à l'Alhambra, le trio qui accompagnait Molly Johnson était composé de Mike Downes (contrebasse - canadien), Sebastiaan De Krom (batterie - néerlandais) et Robi Botos (piano - hongrois). Molly Johson choisit toujours elle-même ses musiciens. Premier critère : les qualités en tant que musicien, deuxième critère : les qualités humaines, les deux étant indispensables à ses yeux.
Quelles sont vos principaux combats dans la vie ?
Je suis très sensible à la prévention contre le SIDA et à l'aide à la prise en charge des malades. J'ai créé une fondation dans ce sens, la fondation Kumbaya, et nous organisons un gros évènement chaque année afin de récolter des fonds. C'est une cause qui me tient beaucoup à cœ,ur, car j'ai perdu pas mal d'amis dans les années 1980 d'une part, et que je suis une maman d'autre part. Je veux participer à l'amélioration des choses pour les générations futures.
C'est aussi la raison pour laquelle je suis investie dans la lutte contre les armes à feu au Canada, la construction de foyers d'accueil pour les jeunes, et beaucoup d'autres choses encore...
L'élection de Barack Obama à la tête des Etats-Unis a-t-elle changé votre vision de ce pays en tant que canadienne, qu'artiste, que femme militant pour certaines valeurs ?
Oui c'est exact. Je refusais d'ailleurs jusqu'ici de me produire aux Etats-Unis. « Le jour où les USA redeviendront démocrates, alors j'irai y chanter » disais-je. Je crois que je n'ai plus le choix désormais (rires).
Plus sérieusement, cette élection d'Obama est un évènement qui m'a bouleversée et donné beaucoup d'espoir. Je suis fière de ça. J'aime d'ailleurs à me qualifier de « noire Obama ». Lui aussi a une mère blanche et un père noir. Nous sommes de la même couleur ! (rires).
Changer le monde, qu'est-ce que cela signifie pour vous ?
C'est faire le maximum pour offrir une vie meilleure à nos enfants et rendre ce monde plus doux. Ce sont des petits pas à accomplir chaque jour, étape après étape. Cela prend du temps, mais je ne suis pas du genre à renoncer devant la tâche.
Comment conciliez-vous votre métier d'artiste et votre vie personnelle et familiale ?
Comme toutes les mamans du monde qui travaillent ! (rires)
Toutes les mamans savent qu'il faut en faire plus en moins de temps, pour demeurer disponible pour ses enfants. C'est universel !
En ce qui me concerne, même si je travaille beaucoup, entre la scène, les émissions de radio, ma fondation, mes actions sociales et tout le reste, je ne m'absente de la maison, à Toronto, que pour de très courtes périodes. Jamais plus de 4 jours. Et mon mari
*Le mari de Molly Johson est un haut responsable d'une agence gouvernementale
m'aide beaucoup, il y a toujours un de nous deux présent auprès de nos enfants
*Molly Johson est mère de 2 garçons, de 9 et 11 ans.
. C'est un choix de vie, une priorité. Je ne pourrais jamais sacrifier l'un pour l'autre.
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