Zermatt, au creux du Valais suisse, c’est le luxe aussi omniprésent que discret. Un luxe pluriel jusque dans les moindres détails du quotidien qui vous ferait presque douter de la réalité du monde. Zermatt est un îlot des sommets qui vous fait déposer armes et bagages sous la très haute protection du Mont Cervin.
Zermatt fête cette année les 150 ans de la première ascension du Cervin (appelé ici Matterhorn) qui culmine à 4478 mètres. Le fait que quatre membres de la cordée initiale y aient payé de leur vie a certes mis un projecteur de plus sur cet exploit. Et fait connaitre mondialement ce village helvétique. Cette divinité naturelle, enneigée toute l’année qui tutoie le soleil, semble protéger les quelque 5000 âmes que compte la cité. Quoi qu’on fasse, en journée, on cherche du regard ce sommet sculptural en forme de pyramide. Intimidant et familier à la fois, au point de donner l’impression de quitter une connaissance lorsqu’on repart vers la plaine.
Comme une divinité protectrice au-dessus du village, le Cervin
Comme l’exprimait Karin Kuntz, directrice du Mont Cervin Palace, l’un des cinq hôtels 5* du village : « notre grand luxe ici, c’est la nature ». Elle est somptueuse il est vrai et autorise le ski même l’été. Bien des célébrités viennent et reviennent chaque année mais ce n’est pas un sujet de conversation pour les Zermattois. Ce n’est pas une station bling-bling. Dans le rues, (sans voitures : seules de petites voitures électriques de fonction sont autorisées) on est loin du défilé de mode. Vêtements de sport et chaussures confortables sont de mise pour tout le monde. Les Zermattois savent qu’ils ont, grâce au Cervin, un joyau inestimable. Ils ont su jusque dans les moindres détails y adapter le plus grand confort.
Le choix difficile
Les nombreuses boutiques alternent entre celles, nombreuses, dédiées au sportswear chic, celles des marques de montres suisses et celle des chocolatiers, confiseurs ou autres commerces de bouche. Le reste n’est que restaurants et hôtels (Zermatt en compte 126).
Ne pas oublier le temps
« Nous accueillons tout le monde de la même façon, souligne Karin Kuntz, inconnus, têtes couronnées, artistes ou écrivains. Il n’y a pas d’accueil de seconde catégorie. A Zermatt 70 % des gens reviennent. Ce sont presque des amis et nous leur réservons toujours leur chambre préférée, nous savons quelles capsules de Nespresso ils veulent dans leur chambre, s’ils mangent sans gluten ou sans viande et nous nous adaptons systématiquement ».
Certains clients aisés choisissent des hôtels 3* et y restent tout aussi fidèles. Cette traditionnelle fidélité de la clientèle est telle que certains viennent de génération en génération et finissent par être nommés Citoyens d’Honneur de la bourgade. Le souci du cadre de vie est manifeste et les règles de construction très strictes. Zermatt peut s’enorgueillir d’avoir conservés intacts, les chalets en bois dont chacun porte un nom avec leurs belles toitures en lauzes.
Les vieilles maisons zermattoises
Si d’emblée les visiteurs se sentent si bien -que ce soit dans le village ou sur les sommets - c’est aussi en raison d’un sens de l’accueil manifeste : on y parle volontiers toutes les langues et notamment français. Dès l’école primaire on apprend aux enfants que leurs parents gagnent leur argent grâce au tourisme et qu’il est dès lors important de savoir bien les accueillir. Comme le tourisme représente quasiment 100 % des revenus des Zermattois, ils s’ingénient en permanence à améliorer l’accueil, le confort, le bien-être des visiteurs. Tout le monde y est concurrent de tout le monde mais s’efforce de rester « friendly competitor ».
Dans les hauteurs de Zermatt au détour d'un hammeau
A ZERMATT ON REGARDE VERS LE HAUT
Si le village ne manque pas de charme, la splendeur s’étale à perte de vue dans les hauteurs. Les sommets sont faciles d’accès grâce à une confortable infrastructure de trains, trains à crémaillères, téléphériques. Ceux qui parviennent pour la première fois sur l’un des plateaux ont souvent la même réaction. Ils ne disent rien mais leur bouche muette dessine un « o » admiratif.
L'or des montagnes du Valais
Les sports de neige ou la randonnée ont ici une saveur accrue. C’est que chaque station de remonte-pente ou de train d’altitude comporte un restaurant d’altitude gastronomique avec des vues imprenables, qui fait des pauses déjeuner ou goûter une récompense de taille après l’effort. Souci du détail : vous trouvez même, aux différentes gares de départ pour les pistes, des panneaux comportant des boîtes de mouchoirs à disposition de tous.
La gastronomie fait partie intégrante de l’accueil zermattois. La viande séchée de bœuf, d’agneau ou de gibiers fait partie des classiques dont on ne se lasse pas. Et si vous cherchez plus original on pourra aussi vous servir parfois de la soupe de foin (aux pommes de terres macérées dans du foin frais) ou un plat au nom surprenant de « cholera »* (un comble lorsqu’on sait que la maladie du même nom part d’une infection intestinale majeure). Il s’agit d’une tourte de pâte feuilletée fourrée de pommes de terre, de légumes divers, de poires et de fromage. Une appellation du genre : « tourte et sa garniture parmentier à la poire Williams et au fromage des alpages » serait évidemment bien plus banale…
Irrésistible boeuf séché aux copeaux de fromage au restaurant d'altitude Findlerhof
PETITS ET GRANDS SECRETS DE LA BOURGEOISIE
Très majoritairement catholiques et pratiquants, les Zermattois maintiennent une tradition de bourgeoisie qui n’est dévolue qu’aux Zermattois de souche (environ 1500 personnes sur les 5000 habitants) dont les noms (Kronig, Perren, Julen, Biner etc) font figure de laissez-passer. A partir de la moitié du 19ème siècle lorsque l’alpinisme et donc une certaine forme de tourisme se sont progressivement développés, ces familles se sont constituées en une sorte de Commune Libre ou commune dans la commune qui subsiste encore. Elle a permis aux paysans d’alors de profiter pleinement du développement touristique à venir.
Dans les années 1870, la commune bourgeoise a construit le Grand Hôtel Zermatterhof, qui était à l’époque, le plus grand hôtel du village avec 94 chambres et 150 lits. Afin d’éviter un endettement trop important, chaque bourgeois de Zermatt devait s’engager à fournir du travail bénévole lors de la construction de l’hôtel. En contrepartie de leur travail d’utilité publique, fut créé un droit de jouissance qui existe aujourd’hui encore.
Une petite pause café bienvenue au milieu du village
Avec le développement du tourisme et la venue des sports d’hiver, les établissements de la bourgeoisie sont devenus de plus en plus nombreux. C’est ainsi qu’à ce jour la bourgeoisie possède et exploite plusieurs hôtels, logements pour groupes, restaurants avec service, restaurants en libre-service, bars (de neige) et boutiques de souvenirs. Parallèlement, elle loue à des tiers plusieurs magasins dans le village et dans les alentours de Zermatt. Chaque membre de la bourgeoisie (environ 1500 personnes) reçoit aussi chaque année une bouteille de Burgerwein (vin de bourgeois) et bénéficie de privilèges dans tous les hôtels ou restaurants appartenant aux autres membres de la confrérie. Ils ont aussi leur mot à dire dans les affaires du village et donc pour tout ce qui touche aux éventuelles nouvelles constructions ou à l’extension du village. On imagine, certains jours les discussions…
*La «cholera» est une tarte dont l'origine remonte probablement aux épidémies de choléra des années 1830. On pense que les habitants n'osant plus sortir de chez eux mettaient tout ce qu’ils gardaient chez eux dans une pâte feuilletée mise au four.
Y ALLER
Par le train, le TGV Lyria vous mène jusqu’à Lausanne ou Bâle où vous attendent les correspondances. On peut aussi y parvenir par Berne ou Zurich. Ensuite un extraordinaire réseau de trains de montagne : Mattherhorn-Gothard Bahn, Sunegga express etc vous mènenent vers les hauteurs
A RAPPORTER
Les viandes séchées et fromages conditionnés sous vide pour le transport, les chocolats les incontournables montres de toutes marques, à tous les prix. Zermatt offre aussi un choix incomparable de vêtements sport chic, vêtements techniques, chaussures et accessoires qui facilitent l’existence en montagne
A VISITER
Le Gornergrat, , le Rothorn, le Mattherhorn Glacier Paradise et tous ces plateaux où on ne peut qu’être éblouis par la beauté du panorama, le lac Leisee joliment aménagé pour se détendre et pratiquer des jeux en plein air, le palais de glace auquel on accède par un ascenseur qui vous mène à 4880 mètres d’altitude.
A VOIR
-Le Matterhorn Museum de Zermatt qui permet de mieux comprendre l’importance des alpinistes et qui relate bien sûr la première épopée d’il y a 150 ans tout juste.
-L’atypique Backstage boutique-hôtel très design qui abrite aussi un cinéma et des espaces dédiés à l’art créé par l’architecte et designer Heinz Julen. Le Spa est une curiosité en soi avec ses 7 espaces conduisant à se laisser bercer par les différentes phases de la création du monde selon la Genèse.
BONNES ADRESSES
- L’office de tourisme très efficace de Zermatt : www.zermatt.ch/fr
- L’hôtel Mirabeau 4* (exemple tarifaire pour un forfait de 3 nuits à 2 début novembre : 1200 francs suisses en demi-pension dans une belle chambre avec balcon et vue sur le Cervin
- L’hôtel Mont Cervin Palace 5*. Le type même d’hôtel où il faut réserver au moins un an à l’avance sauf aux rares moments creux. Début septembre vous pouvez, par exemple avoir une offre pour deux adultes et deux enfants en junior suite avec vue sur le Cervin pour 1500 €.
- Les boutiques Bogner, Peak Performance, Jet Set ou Mammut store pour le sportswear chic
- Les restaurants Chez Heini, Schäfferstube, Cervo dans Zermatt et la ravissante et très gastronomique auberge de montagne Finklerhoff dans le hammeau de Findeln
Texte et photos Evelyne Dreyfus
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