HP, surdoués, ou zèbres,… Plus personne ne peut aujourd’hui ignorer ces termes si utilisés qu’ils en deviennent galvaudés. Il y a pourtant entre 5 et 8% de la population qui se reconnaissent dans ces qualifications qui loin d’être une « mode », sont plutôt une réalité positive. Mais finalement qu’y a t-il derrière ces mots ?
Education: comment gérer un enfant Haut Potentiel ?
Il y a tout d’abord des chiffres, qui évidemment ne sont pas la manière la plus conviviale d’aborder le profil d’un individu ! Ces chiffres concernent l’évaluation du Quotient Intellectuel : s’il est supérieur à 130, il sera qualifié de surdoué. Mais c’est surtout une hypersensibilité qui caractérise ces « drôle de zèbres » que la romancière Isabelle Bary a choisi comme héros dans son dernier ouvrage, talentueux et émouvant.
Vilains petits canards
Beaucoup de personnes sont HP sans le savoir… Et au fond, tous les héros le sont potentiellement par leur côté « hors du commun » commence Isabelle Bary.
La solitude, cette sensation d’être à part, pas intégré, différent du groupe : l’enfant HP la connaît depuis qu’il évolue en société. Au fond de lui, il ne recherche pas le groupe mais il souffre de se sentir exclu. Dans son livre, l’auteur raconte l’histoire de Thomas, un adolescent en 2050, qui lit le journal de sa grand-mère dans lequel elle raconte son périple de « maman d’un enfant haut-potentiel », le père de Thomas.
Tout au long de l’ouvrage, nous plongeons dans l’humour et parfois la détresse d’une maman qui, comme toutes les mères, veut le meilleur pour sa famille mais se trouve confrontée aux différences, aux jugements des autres, et surtout à la complexité de traiter son enfant « zèbre » avec toute l’attention personnalisée qu’il requiert sans le marginaliser.
Dotés d’une intelligence extrêmement fine et vive, les enfants HP ont le sentiment de comprendre très vite mais sont souvent incapables de déconstruire leur raisonnement. Ce qui les met dans une position où ils peuvent paraître prétentieux car ils ont la certitude d’avoir raison. Parfois, ces enfants doués à l’école ont honte de réussir car cela les isole encore plus.
« Il est tout à fait accepté socialement de clamer ses résultats sportifs mais mal considéré d’être le premier, l’intello, et de faire valoir ces qualités-là » analyse Isabelle Bary.
40% des enfants HP sont en échec scolaire car ils finissent par s’ennuyer à l’école. Ils n’apprennent pas le sens de l’effort, la satisfaction du mérite, ils sont en décrochage du fait de leur intelligence différente.
En quoi est-elle particulière cette façon de percevoir le monde ? Les HP ont une pensée construite en arborescence. C’est à dire que leur cerveau n’en finit pas d’établir des connections, des liens entre ce qu’ils entendent, voient, ressentent, et cette pensée non linéaire les amène souvent dans des terres inconnues éloignées des contingences immédiates.
« Ce qui peut être déconcertant pour mon entourage, c'est mon aptitude à sauter, parfois de façon exagérée, d'un problème à un autre, ou à l’opposé, d’être obsessionnel sur un thème totalement extérieur aux véritables urgences du moment » explique un adulte à Haut Potentiel.
L’enfant HP est souvent doté d’une sensibilité accrue des cinq sens (hyperesthésie) qui par conséquent seront agressés par les odeurs, les sons, qui sont considérés comme « normaux ».
« Mon fils de 6 ans est régulièrement incommodé par les odeurs humaines, et réagit violemment par rapport aux personnes qui les dégagent… Cela semble grossier de sa part mais il est réellement en souffrance et ne parvient pas à gérer cette agression calmement » nous explique une mère.
Exclu du groupe
Il est très pénible pour des parents de constater que son enfant n’est pas invité aux fêtes d’anniversaire, qu’il lit des BD dans sa chambre quand tous ses contemporains jouent au foot, qu’il préfère faire un powerpoint sur « les désastres de la pollution sur la nappe phréatique » plutôt que de faire son devoir de français…
L’enfant semble par moment heureux, mais souvent, il souffre de sa propre marginalité. Et c’est surtout entre 9 et 12 ans que cette mise à l’écart est la plus marquante car c’est la période où le groupe est constituant de la personnalité de ces adultes en devenir.
« J’ai dû expliquer à mon fils qui il était, et qu’il lui faudra parfois faire semblant pour s’adapter à la vie en société ».
Pour ces enfants habitués à avoir certaines immenses facilités intellectuelles, la motivation est cruciale : nous pouvons par exemple lui expliquer que s'il veut construire des ponts plus tard, il lui faut réussir « ce stupide examen de géométrie » et rendre la matière plus créative en lui proposant des applications concrètes comme mesurer sa chambre, calculer en combien de pas il se rend à l’école, etc.
Enfant-miroir
Plus que tout autre enfant, les jeunes « zèbres » testent en permanence la fiabilité de leurs parents. S'ils se rendent compte que nous sommes faillibles, cela les angoisse car ils n’ont plus de filet pour les réceptionner. Leur montrer nos faiblesses, c’est aussi leur enseigner qu’il faut faire des choix et devenir responsable. Tout n’est pas juste ou injuste, noir ou blanc, il existe une voie du milieu propre à chacun de nous.
« En tant que parents, c’est à nous de leur montrer que l’on peut avoir un sens accru de la justice et ne pas nécessairement vouloir être le chevalier redresseur de torts » ajoute l’auteur.
« Nous vivons dans une société qui cultive la ressemblance. Essayons de privilégier les différences, d’encourager les talents plutôt que de vouloir aplanir les dispositions naturelles de chacun » conclut Isabelle Bary.
Par Aurore t'Kint
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