Cuisine et arts de la table à la Renaissance
Présentée à partir du 7 juillet 2012 et jusqu'au 21 octobre 2012 au château royal de Blois, « Festins de la Renaissance » est la première exposition entièrement consacrée à ce thème. Elle fait écho au récent classement du repas gastronomique français au patrimoine mondial de l'Unesco. Visite en avant-première le 5 juillet dernier avec Elisabeth Latrémolière, conservateur en chef du patrimoine, directrice du château et des musées de Blois.
Tableaux, livres de cuisine ('à l'époque, ils sont réservés aux professionnels', précise Elisabeth Latrémolière), orfèvrerie, émaux, vaisselle de table et d'office, mobilier... C'est une exposition de toute beauté et très complète que nous propose le château royal de Blois avec « Festins de la Renaissance ». Les objets et documents ainsi réunis, dont plusieurs présentés pour la première fois au public, illustrent à la fois le contenu des repas, l'architecture des cuisines, les manières de table et le spectacle des banquets du temps de la Renaissance.
L'exposition offre l'occasion d'entrer dans l'intimité d'une époque dominée par le renouveau de la cuisine française aristocratique sous le signe du sucré, du raffinement des manières de table et de la mise en scène du repas royal.
« Festins de la Renaissance » présente des œ,uvres majeures grâce à une scénographie riche en questionnements.
Plusieurs grands thèmes à ce jour largement inexplorés sont abordés :
l'histoire de la fourchette , le mythe des cuisiniers de Catherine de Médicis , les produits d'Amérique ,
les différentes vaisselles d'usage, d'apparat, d'office.
Ces réflexions, qui sont d'actualité dans différents programmes de recherche, sont présentées dans un solide catalogue.
“Le Moyen Age fut l'ère des ragoûts assaisonnés, la Renaissance l'âge des friandises.”(JF Revel)
Le parcours de l'exposition
'Comprendre, découvrir, s'émouvoir...nous avons souhaité que le parcours de l'exposition repose sur cette triple thématique, qui sont trois caractéristiques de la table princière à cette époque', explique Elisabeth Latrémolière.
En préambule, on découvre la table à la fin du Moyen Age . En salle 1, on apprend ce qu'on mange. En salle 2, on découvre comment on mange. La bonne tenue à table devient un élément de distinction plus important que l'apparat du festin. Des bonnes manières dont nous sommes redevables à l'Italie et son traité des civilités. En salle 3, on comprend le rôle du moment où l'on mange. La table au XVIe siècle devient l' expression favorite du pouvoir . Enfin, en épilogue : Le service à la cour de Louis XIII.
A chaque salle, à chaque thème, correspond un moment d'histoire, un espace particulier du repas et un type d'objets.
- Un parcours d'histoire : trois moments de l'histoire du repas à la Renaissance, le repas à la fin du Moyen Age, le repas de la première Renaissance au temps de François Ier, le repas de la seconde Renaissance au temps de Henri III. 'Celui-ci établit un règlement de la cour. explique Elisabeth Latrémolière. Et l'organisation du repas est confiée à une brigade avec maître d'hôtel, panetier, fruitier, écuyer tranchant...'
- Un parcours des espaces, dans les lieux liés au repas : trois ambiances, en lien avec les différentes thématiques : la cuisine, lieu de préparation des repas, le lieu du repas, espace des rituels et de l'ordonnancement de la table princière, le cabinet, lieu d'exposition de la vaisselle d'apparat.
- Un parcours des objets, à travers la culture matérielle : trois types d'objets : la vaisselle d'office, la vaisselle de table et de dignité, la vaisselle d'apparat.
Trois objets symboliques des arts et des manières de la table ponctuent le parcours sous forme de vitrines présentant une évolution de l'objet sur la période : la cuillère : car c'est l'instrument le plus anciennement utilisé pour manger , la fourchette : car c'est l'instrument symbole d'un certain raffinement à table ,
le couteau : car c'est l'instrument typique du rituel de la table, celui de l'écuyer tranchant. Et Elisabeth Latrémolière de préciser que, critiquée par l'Eglise comme objet favorisant la gourmandise, pendant un temps, la fourchette fut interdite dans les couvents !
Au-delà de ces objets symboliques, on découvre également dans cette exposition des objets qui, aujourd'hui, peuvent nous paraître insolites. Par exemple, cet ensemble cure dents, cure oreilles, cure ongles que l'on portait en collier, comme un bijou. Ou encore, cette très belle nef (voir photo ci-dessous), pièce de vaisselle de dignité qui se distingue de la vaisselle d'apparat par un usage précis : c'est une pièce de vaisselle ostentatoire qui marque la place d'honneur sur la table. Fermée à clé elle contenait le nécessaire du prince (une cuillère, un couteau, une serviette et un cure-dent). Outre le couvert on y trouvait des épices et des 'épreuves', c'est-à-dire des 'contrepoisons'.
L'exposition présente des évocations et des mises en scène réalisées à partir de représentations de tables et de cuisines des XVe et XVIe siècles.
Ces évocations permettent de rendre visibles des réalités aujourd'hui étonnantes de la table princière d'alors : il n'y a pas de meuble spécifique pour manger : on “dresse une table” en posant des planches sur des tréteaux.
La richesse de la table réside dans le nappage : la table, même princière, est très peu garnie en vaisselle. La richesse et le rang social se manifestent par une abondante vaisselle d'apparat, dont on ne se sert pas et qui est exposée sur des buffets ou des dressoirs (parfois en forme d'escaliers à peu de marches), sorte d'ancêtres des vaisseliers. Et là, on présente des pièces luxueuses, richement décorées. On y dispose aussi des faïences dites de Saint-Porchaire, cette faïence fine de la Renaissance dont il ne reste aujourd'hui que quelques dizaines d'exemplaires dans le monde et dont les prix atteignent des sommets. Jusqu'à deux millions d'euros pièce, selon Elisabeth Latrémolière.
Il n'y a pas de vaisselle à boire sur la table, le service de la boisson se faisant via des serviteurs.
Bref, visiter « Festins de la Renaissance » donne l'occasion de (ré)apprendre, de s'étonner, d'admirer.
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- Commissaire général : Elisabeth Latrémolière (conservateur et directeur, château royal de Blois), avec la collaboration de Pierre-Gilles Girault (conservateur-adjoint, château royal de Blois) et de Hélène Lebédel-Carbonnel (responsable des collections Beaux-Arts, château royal de Blois)
- Comité scientifique :
Président : Florent Quellier (IEHCA). Pascal Brioist (maître de conférences, CESR, université de Tours), Valérie Boudier (maître de conférences, Université Lille III), Monique Chatenet (Conservateur en chef du patrimoine, centre André Chastel), Francis Chevrier (directeur IEHCA), Thierry Crépin-Leblond,(conservateur général du patrimoine, directeur du musée national de la Renaissance), Kilien Stengel (chargé de mission scientifique, IEHCA) Fabienne Ravoire (ingénieur de recherches, INRAP Ile—,de-France).
- « Festins de la Renaissance »
- Du 7 juillet au 21 octobre 2012
- Château Royal de Blois
41000 Blois - France
Tél. : 02 54 90 33 33
Fax : 02 54 90 33 31
- L'exposition « Festins de la Renaissance » est reconnue d'intérêt national par le ministère de la Culture et de la Communication / la Direction générale des patrimoines / Service des musées de France. Elle bénéficie à ce titre d'un soutien financier exceptionnel de l'Etat. Elle est conçue par la conservation du château royal et des musées de Blois en partenariat scientifique avec l'Institut européen d'histoire et des cultures de l'alimentation (IEHCA) et le Centre d'études supérieures de la Renaissance (CESR) de l'université François-Rabelais de Tours.
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