Lorsqu’il créa le concept de capital solaire dans les années 1990, le Pr Louis Dubertret* proposait un outil pédagogique facile à comprendre. Dés notre conception nous héritons d’une couleur de peau et d’un ensemble d’enzymes permettant de réparer les dommages provoqués par le soleil. D’agression en agression la réparation se fait de moins en moins bien, comme si nous consommions un capital. Nous avons besoin du soleil toute notre vie pour notre santé. Il faut donc apprendre à gérer ce précieux capital.
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Interview vérité : comment gérer son capital soleil
TPLF : Pr Dubertret, comment peut-on définir l’idée de capital solaire ?
Pr LD : C’est la capacité dont nous disposons à notre naissance de nous adapter au rayonnement des UV et d'en réparer les méfaits. Le couleur de la peau est bien sûr importante. Notre couleur de peau résulte du mélange de deux pigments : les eumélanines noires qui protègent du soleil, les phaeomélanines rouges qui aggravent les dommages du soleil. Le bronzage témoigne des fractures moléculaires et ne protège pas beaucoup mieux, il n’a donc aucun intérêt. Les propriètés anti oxydantes de la peau, très différentes selon les individus jouent sans doute un rôle important. Enfin, chaque exposition au soleil détériore notre ADN qui doit à chaque fois se réparer en faisant appel à notre stock d’enzymes de réparation, différent d’un individu à l’autre et qui va perdre peu à peu son efficacité au fil des expositions. Nous sommes inégaux par rapport au soleil.
TPLF : Devant une telle variété de statuts possibles, quand sait-on qu’on a un peu trop dépensé sur son compte capital solaire individuel ?
Pr LD : Il n’y a pas réellement de test qui permette de le savoir. Il en existe pour la recheche mais il faudrait parvenir à les simplifier pour permettre de vérifier où en est la capacité de réparation de chacun d’entre nous à différents moments de la vie. Cela viendra peut-être dans l’avenir. En attendant il faut protéger sa peau à tout âge et la surveiller.
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TPLF : Y a-t-il des signes visibles permettant de se dire : mon capital solaire commence à s’épuiser, redoublons de vigilance ?
Pr LD : C’est encore une fois très variable d’un individu à l’autre selon son capital génétique. Mais généralement, c’est souvent sur le cou que se manifestent les premiers signes qui doivent alerter. La peau prend un aspect un peu rouge parsemé de petis points blancs témoignant de la destruction des fibres élastiques de la peau. Au niveau du visage et du dos des mains apparaissent ensuite des fines rides et des taches brunes. Puis ce sont des kératoses que l’on retrouve sur les zones les plus exposées : cou, visage, mains, cuir chevelu pour les chauves. Elles sont le signe d’une forte diminution des capacités de réparation et, si l ‘on continue à s’exposer une sur cent environ se transformera en cancer.
TPLF : Alors quelles sont les solutions ?
Pr LD : Eviter de trop s’exposer, se rhabiller après le bain, utiliser les parasols, faire appel aux crèmes solaires. Les crèmes solaires ne sont efficaces que si on ne les utilise pas pour rester plus longtemps au soleil, sinon on ne fait qu’éviter une toxicité aigue (le coup de soleil) par une toxicité chronique (vieillissement et cancer). Pour les jeunes enfants, la protection est capitale : aucun bénéfice à les exposer, le coup de soleil retardé d’une douzaine d’heures peut être très grave. On leur fait consommer sans aucun bénéfice une part importante de leur capital soleil, ils ne pourront plus le consommer plus tard.
Ce capital se consomme tout la vie mais les cicatrices moléculaires s’accumulent au fur et à mesure. Plus on avance en âge, moins les dommages se réparent et plus il faut se protéger.
Propos recueillis par Evelyne Dreyfus
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