A en croire les « couvs » de nos magazines et journaux, le diagnostique est posé et sans appel : notre système démocratique est en souffrance. Et aucun médecin, même malgré lui, ne semblerait se porter à son chevet. C'est oublier ces initiatives émergentes qui mettent la technologie au service d'une démocratie participative. Tour d'horizon.
Le cri d’humour noir de Coluche « Un pour tous, tous pourris », résonne plus que jamais dans nos conversations, sur les réseaux sociaux et auprès des journalistes, la légèreté en moins. Au vu du succès du « Petit Journal » il est vrai que nombreux sont ceux qui aimeraient être en mesure de manier humour et actualité politique avec virtuosité. Mais est-ce bien à la portée de tous et surtout est-ce le rôle de chacun ?
Sous couvert de vouloir combler le vidé béant laissé par Michel Colucci, il est tentant de tirer sur l’ambulance et dézinguer nos hommes politiques. Il faut dire que nos esprits cathodiques se laissent parfois facilement séduire par le chant de perdition de nos stars médiatiques. Il y a peu, le très talentueux humoriste Jeremy Ferrari a interpellé âprement et avec une touchante sincérité mais sans se soucier des raccourcis utilisés, le premier ministre Manuel Valls sur un plateau de télévision. Toujours emprunts de nostalgie, les téléspectateurs ont préféré y voir un nouveau Daniel Balavoine plutôt qu’une envolée à l’emporte pièce. Cette petite sortie a eu le mérite pour son auteur de faire un énorme buzz.
L’émotionnel reste bien souvent le maître à penser de la réflexion. Bien que les éditorialistes soient en première ligne, nous sommes, nous aussi, de parfaits petits fantassins prêts à dégainer notre petit « post ». Il faut dire qu’il nous est plus facile de nous en prendre à nos représentants politiques que nous engager nous-mêmes à faire vivre une démocratie annoncée comme finie. Assis bien au chaud derrière l’ordinateur, nombreux sont ceux qui relaient tout et surtout n’importe quoi sur les réseaux sociaux pour engranger quelques « likes » qu’ils comptabiliseront le soir venu sous la couette. Et tant pis si la fiabilité de la source n’est pas avérée.
Ce doux mélange des genres porte un nom : «l’infotainement » (alliance des mots : information & entertainement). Et il faut bien dire qu’en mal de voix, nos politiciens se laissent eux aussi tenter, pour faire entendre la leur, par ce jeu dont ils ne maîtrisent finalement pas tant que ça les règles mouvantes. Dans cette cacophonie, d’aucuns s’évertuent à nous ouvrir les yeux à l’instar récemment d’Edouard Baer et Vincent Lindon, et dénoncent les raccourcis un peu trop faciles dans lesquelles les uns et les autres se laissent embarquer. Le début d’une prise de conscience peut-être.
Pourtant alors qu’à chaque scrutin, les hommes et femmes politiques semblent, en effet, s’éloigner de plus en plus des citoyens, des actions citoyennes, elles, voient le jour pour rétablir ce lien essentiel. Elles s’inscrivent principalement à un niveau local renforçant cette nouvelle lame de fond apparue dans les domaines de l’économie, de l’écologie, et maintenant de la politique : « Think global act local ». Car « la politique c’est un peu comme le flirt, pour aller plus loin il faut aller plus près », pour citer une dernière fois Coluche.
Parmi ces initiatives, il y a celle de la Mairie de Paris qui permet aux parisiens de proposer des projets d’investissement pour la capitale à hauteur de 5% du budget d’investissement de la ville. Soit 100 millions d’Euros en 2016. Une maigre partie du budget global assurément, mais la dynamique d’une démocratie participative est bien lancée. Et des jeunes entrepreneurs issus des nouvelles technologies viennent, à leur tour, redynamiser un système politique aussi précieux que fragile.
Julie de Pimodan, avec son application www.Flui.city fait la synthèse entre l’innovation digitale et l’engagement civique.
Le souhait est de « redonner envie aux gens de participer, de s’impliquer dans la construction de l’espace public ».
Forte de son expérience de reporter au Moyen-Orient pendant les Printemps arabes et d'une expérience chez Google, Julie a lancé Flui.city. Sur cette application, les citoyens échangent en direct avec leurs élus, ils proposent des idées et la Mairie intègre les résultats dans des solutions adaptées. Les habitants s’expriment aussi sur les propositions de la collectivité, signalent un dommage dans leur quartier, etc. Avec cette banque d’informations, les responsables politiques prennent des mesures plus efficaces sous le regard vigilant des citoyens qui vérifient désormais l’impact de leurs avis. Et quitte à lancer un billet d’humeur, ces derniers l’adressent directement à leurs élus. A condition évidemment de ne pas le faire pour l’amour du buzz.
Flui.city est loin d’être la seule plate-forme participative. Les citoyens peuvent aussi être pleinement acteurs dans le processus législatif à un niveau national, en allant sur https://www.parlement-et-citoyens.fr. Une plate-forme qui favorise le débat entre les élus et les citoyens et qui leur permet d’être porteur de propositions concrètes débattues au Parlement. Cette anti-chambre du Parlement en ligne, qui restreint l’influence des lobbies et les intérêts partisans, n’a rien de virtuel.
Car oui « l’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable…Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou », celle d’une nouvelle ère démocratique inter-active et co-constructive. Il ne tient qu’à nous d’entendre l’appel de « Sagesse » lancé en son temps par Verlaine à son amant. Si nous prenions à bras les corps les moyens qui nous sont offerts, sans nous cacher par paresse derrière nos poncifs, notre système démocratique ne pourrait bien être finalement qu’un malade imaginaire.
Par Dimitri
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