Les nouvelles salles du département des Arts de l'Islam au musée du Louvre ont été inaugurées le 18 septembre 2012.
Créé en 2003, en chantier depuis 2008, le département des Arts de l'Islam ouvrira ses portes le 22 septembre 2012 dans des espaces entièrement nouveaux et repensés, recouverts d'une verrière formant un nuage doré flottant au-dessus de la muséographie.
La cour Visconti du musée du Louvre accueille désormais les Arts de l'islam. Avec ce projet initié il y a 10 ans, il s'agit pour Henri Loyrette, président-directeur du Louvre de « donner toute sa place au département des arts de l'Islam au sein du Louvre ». Le musée dispose en effet d'une collection importante d'objets islamiques restée dans les réserves, faute de place.
Les architectes lauréats, Mario Bellini et Rudy Ricciotti, ont relevé le défi de construire un bâtiment d'une grande modernité dans un lieu ancien et classé. Les espaces muséographiques qu'ils ont dessinés se déploient sur 2 800 m² répartis en deux niveaux, au-dessus d'une zone d'espaces techniques. Avec ces nouveaux espaces, le département triple ses surfaces d'exposition.
Point d'orgue du projet architectural, les salles de la cour Visconti sont recouverte d'une verrière qui respecte les façades historiques tout en l'ornant d'un élément d'une grande originalité. D'un coût de près de 100 millions d'euros, ces nouvelles salles ont été financés à 57% par des fonds privés. Il s'agit de la plus vaste opération de mécénat jamais entreprise au Louvre.
Une prouesse architecturale
La cour Visconti n'offre pas de ligne de corniche continue sur laquelle aurait pu venir se poser aisément une verrière. Par ailleurs, une telle structure aurait culminée, en outre, à plus d'une trentaine de mètres au-dessus de collections qu'elle aurait écrasées visuellement. Les architectes, Mario Bellini et Rudy Ricciotti, ont donc opté pour la construction d'un écrin de verre et de métal qui se détache (de 2,5 et 4 mètres) des façades de la cour.
Véritable prouesse architecturale, la couverture forme un nuage doré flottant au-dessus des salles du département des arts de l'islam. Elle fait aussi penser à un tapis volant digne des Mille et une nuit. Pour sa part, Mario Bellini la voit légère et brillante comme une « aile de libellule »...
L'une des plus belles collections du monde
Initié il y a 10 ans, le département dédié aux arts de l'islam s'appuie sur la collection du musée, riche de quelque 15000 pièces, et complétée par un dépôt de 3400 oeuvres du musée des Arts décoratifs. L'ensemble couvre la totalité du champ culturel du monde de l'islam aussi bien du point de vue géographique (de l'Espagne jusqu'à l'Inde) que chronologique (du VIIe au XIXe siècle). Le département continue à enrichir ses collections par achat ou par don.
Le musée du Louvre possède aujourd'hui dans ce domaine l'une des collections les plus riches et les plus belles du monde. Près de 3 000 oeuvres sont aujourd'hui présentées dans les nouveaux espaces de la cour Visconti.
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Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre, explique l'enjeu de ce nouveau département des Arts de l'Islam au sein du musée.
Sophie MaKariou, directrice du département des Arts de l'Islam, invite le visiteur à une déambulation à travers les nouveaux espaces du département.
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Préface
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Texte extrait de Les arts de l'Islam au musée du Louvre, sous la direction de Sophie Makariou, coéd. musée du Louvre éditions/Hazan.
Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre
Vingt ans après le grand chantier de la pyramide, la création du nouveau département des Arts de l'Islam au sein du musée du Louvre représente une étape décisive dans l'histoire architecturale du palais et du musée, un palais en constant devenir et qui porte dans ses gènes, depuis huit siècles, la volonté d'aller de l'avant sans cesse.
Le projet de fonder ce huitième département patrimonial est né d'une constatation que j'avais faite dès mon arrivée au Louvre, en 2001 : notre musée possédait l'une des plus belles collections au monde dans le domaine des arts de l'Islam, mais un dixième seulement des œ,uvres étaient présentées et, faute de place, nous ne pouvions ni remonter les grands éléments d'architecture, ni déployer notre exceptionnelle collection de tapis. Il était indispensable qu'une civilisation si importante, si intimement liée à l'ensemble des domaines couverts par le Louvre, touchant tant de siècles et de pays, ait enfin droit à des espaces dignes en qualité et en surface.
C'est en 2003 qu'a germé cette belle idée, ce rêve aujourd'hui devenu réalité. Ce rêve, il prend ses racines dans la vocation même du Louvre, conçu dès son origine, au XVIIIe siècle, comme un musée universel, un lieu où, par le truchement des œ,uvres d'art, les époques et les civilisations dialoguent entre elles. Après le Grand Louvre cher à François Mitterrand, ce chantier est rapidement devenu un projet présidentiel voulu et soutenu par les différents chefs de l'État qui lui ont succédé. Dès le 1er août 2003, le président de la République Jacques Chirac a annoncé la création de ce huitième département patrimonial du Louvre. Le 16 juillet 2008, lors de la pose de la première pierre, le président Nicolas Sarkozy a souligné l'importance de ce projet dans le cadre du dialogue entre les cultures et les peuples. Et c'est sous les auspices du président François Hollande que ce grand projet, à la fois artistique et politique dans le sens le plus noble du terme, voit le jour.
Les œ,uvres exposées dans ces nouveaux espaces réunissent deux collections : celle issue du Louvre, à laquelle s'ajoute celle, substantielle, de la collection du musée des Arts décoratifs. Ces deux collections réunies couvrent avec éclat l'ensemble du champ culturel de la civilisation islamique, de l'Espagne à l'Inde, et dans toute son envergure chronologique, du VIIe au XIXe siècle.
Une autre caractéristique de ce projet touche à son architecture. Dès le départ, notre parti pris a été de ne pas remodeler des salles existantes, mais de construire de nouveaux espaces. Et de le faire à la fois dans l'esprit des lieux et en nous efforçant de capter ce qui se faisait de plus beau et de plus novateur dans le domaine de l'architecture, ce que le palais du Louvre s'est toujours attaché à faire, à chaque époque, tout au long de son histoire presque millénaire.
La création et l'intégration de ces nouveaux espaces ont constitué un véritable défi architectural et même technique, dans cette cour Visconti, lieu chargé d'histoire, situé au cœ,ur même du palais du Louvre. Pour répondre à ce défi, les architectes Mario Bellini et Rudy Ricciotti ont su trouver un subtil et élégant équilibre entre le classicisme de la cour du XVIIIe siècle et l'évocation des arts de l'Islam à travers une verrière ondulante, remarquablement novatrice, alliant le verre et le métal, qui prolonge l'aplomb des façades existantes de la cour Visconti.
Ce chantier a été également l'occasion d'ajouter un nouveau chapitre au projet du Grand Louvre en aménageant, au voisinage immédiat des Arts de l'Islam, les salles consacrées à l'Orient méditerranéen à
4l'époque romaine. Ces œ,uvres de l'Antiquité tardive proviennent du bassin oriental de la Méditerranée à partir du IIIe siècle avant J.-C., de l'Égypte romaine et copte, de Phénicie et de Palestine. Ainsi, le nouveau département des Arts de l'Islam et les salles alentour s'inscrivent désormais dans des ensembles et des espaces architecturaux continus, cohérents et harmonieux.
Revêtant une dimension tout à la fois architecturale, culturelle et artistique, cette immense réalisation vient rappeler avec éclat la mission qui incombe au Louvre depuis son érection en musée universel, au cœ,ur de la Révolution française , une vocation sans cesse renouvelée et mise au goût du jour pour en faire un musée ouvert sur le monde, un « musée-monde » pour reprendre l'heureuse expression de J-M. G. Le Clézio. Le Louvre est aujourd'hui présent sur tous les continents à travers des expositions, des chantiers de fouilles, des expertises scientifiques et muséographiques. Et ce nouveau département des Arts de l'Islam s'impose comme un espace et un lieu à la fois témoin et carrefour d'une compréhension mutuelle , une passerelle entre Orient et Occident, qui parleront de leurs différences, mais aussi de leur histoire commune, de leurs interpénétrations mutuelles tout au long des siècles.
Le choix même du nom que nous avons attribué à ces nouveaux espaces —, département des Arts de l'Islam —, s'inscrit dans une démarche que le Louvre assume pleinement. Il s'agit en effet, pour nous, de présenter la face lumineuse d'une civilisation qui engloba en son sein une humanité infiniment variée et riche. À travers ce geste artistique, nous avons souhaité mettre en avant une approche large et inclusive qui rassemble des mondes très divers (andalou, mamlouk, ottoman, persan...).
Ce grand dessein n'aurait pu se réaliser sans l'appui de généreux donateurs et de mécènes venus d'horizons très divers : Son Altesse royale le prince Alwaleed bin Talal bin Abdulaziz Al Saud, qui a été le premier à nous apporter son soutien , Sa Majesté le roi du Maroc , l'État du Koweït , le Sultanat d'Oman et la République d'Azerbaïdjan. De grandes entreprises françaises, la Fondation Total et Lafarge, ont souhaité soutenir financièrement la construction de ces nouveaux espaces. Des donations individuelles ou d'entreprises ont également contribué au financement du projet : Frédéric Jousset et la Fondation Orange.
Je rendrai enfin un hommage appuyé à toutes celles et tous ceux qui, par leur travail, leurs recherches ou leur soutien actif, ont su créer les conditions rendant cette réalisation possible. Qu'il s'agisse du travail pionnier de Marthe Bernus-Taylor, encouragée par mon prédécesseur Michel Laclotte, de l'appui précieux du musée des Arts décoratifs ou encore, tout au long de ce grand chantier, de l'implication remarquable des équipes du nouveau département des Arts de l'Islam, sous l'impulsion et la direction de Sophie Makariou.
En visitant le Louvre, Charles Péguy éprouvait un double sentiment : la promotion de l'être et la perception du long et visible cheminement de l'humanité. Je forme le vœ,u que les publics éprouvent des sentiments semblables en découvrant ces nouveaux espaces, ce joyau architectural et les trésors qu'il recèle.
Introduction
*Texte extrait de Les arts de l'Islam au musée du Louvre, sous la direction de Sophie Makariou, coéd. musée du Louvre éditions/Hazan.
Sophie Makariou, directeur du département des Arts de l'Islam
Le département des Arts de l'Islam est l'aboutissement du plus grand chantier ouvert au musée du Louvre depuis les travaux du Grand Louvre. Dotée de plus de quinze mille objets et complétée par les trois mille cinq cent œ,uvres déposées par le musée des Arts décoratifs, cette collection témoigne de la diversité des créations artistiques issues de mille deux cent ans d'histoire et d'un territoire déployé sur trois continents.
Les nouveaux espaces mettent ainsi en lumière l'une des collections les plus riches et les plus belles du monde dans le domaine des arts de l'Islam du VIIe au XIXe siècle.
En français, le mot « ISLAM » a deux sens : « islam » désigne la sphère religieuse et « Islam » évoque la civilisation. Pour parler de la religion, le terme « musulman » est également utilisé —, c'est la formule employée à la genèse de cette collection, avec la création en 1893 d'une « section des arts musulmans ». L'importance prise par la notion d'« art islamique » à partir de 1946 élargit considérablement le champ d'étude : les appellations « Islam » et « art islamique » se sont alors imposées.
Cette dénomination est aujourd'hui justifiée. En effet, l'« art musulman » désigne exclusivement l'art qui est destiné à la sphère religieuse. Cette définition est assez restrictive , c'est l'art des mosquées, des copies coraniques, etc... Mais le monde islamique dans son immensité, de l'Inde jusqu'à l'Espagne, sur plus de douze siècles d'histoire, se compose-t-il uniquement d'art religieux ? Bien sûr que non. Il a largement produit des objets pour des élites, dont il n'est d'ailleurs pas toujours assuré qu'elles aient été musulmanes. Et ces objets appartiennent au monde civil, au monde du pouvoir , il est donc logique d'y appliquer le terme d'« islamique ». De même, le monde islamique comprend des peuples non-musulmans, à l'instar de la Syrie, dont la population, au XIIe siècle, demeurait majoritairement chrétienne. Faut-il pour autant faire de la Syrie au XIIe siècle une province de l'art chrétien ? J'en doute.
L'« ISLAM » fait beaucoup débat aujourd'hui. Pourtant, il faut accepter ce terme —, ce que nous avons fait. Redonner sa grandeur à l'Islam et ne pas le laisser au djihadistes et à ceux qui le salissent est fondamental. Bien évidemment, nous assumons ce mot, nous le portons, et nous avons fermement l'intention de le montrer dans l'immensité de ce qu'il recouvre, avec toutes les communautés qui ont constitué cette civilisation. Nous voulons dévoiler l'Islam de Qusta ibn Luqa, grand mathématicien chrétien et auteur d'œ,uvres essentielles de la science arabe à Bagdad au IXe siècle, ou encore celle de Recemundo (Rabbi ben Zaïd), évêque de Cordoue, un familier de la cour du calife de Cordoue qui écrivait en arabe, mais aussi l'Islam de Moïse Maïmonide, grand savant juif qui a écrit son œ,uvre en arabe, annotée en caractères hébraïques.
C'est cette immensité de contributions, ce creuset de peuples que nous avons voulu présenter, dans un projet architectural ambitieux et intellectuel.
Je tiens d'ailleurs à saluer tout particulièrement le travail très remarquable de la maîtrise d'œ,uvre, Mario Bellini, Rudy Ricciotti et Renaud Piérard. Leur réponse architecturale est absolument extraordinaire d'intelligence, exauçant tous nos souhaits sur la transparence, la fluidité des espaces ou encore la lumière naturelle.
Je suis donc aujourd'hui un conservateur comblé puisque la création des architectes n'a pas seulement le mérite d'être appropriée, elle est aussi d'une véritable qualité spatiale qui a, selon moi, dépassé nos espérances.
Je suis allée régulièrement sur le chantier, en particulier avec la direction de la maîtrise d'ouvrage et Cristina Haye, sa directrice, dont je salue, ainsi que toute l'équipe, le travail formidable. J'ai été à chaque fois éblouie par la beauté de ce qui avait été créé. Dans ce très bel espace, réparti sur deux niveaux, s'opère une transition magnifique, de la lumière à l'ombre, à laquelle pourraient correspondre des commentaires mystiques qui iraient si bien avec ce qu'ont produit les mouvements soufis dans l'Islam. Ces nouveaux espaces des Arts de l'Islam sont donc adaptés aux collections et leur font se révéler encore davantage.
À l'espace s'ajoute, bien-sûr, la rigueur d'un développement chronologique et d'un exposé didactique, accompagnés d'une médiation culturelle de qualité et d'innovations en terme de signalétique et de cartographie en particulier. Là aussi, les réponses esthétiques produites par Renaud Piérard sont tout à fait admirables , c'est la création de vrais objets muséographiques qui ont grande allure.
C'est tout cet enchantement que, j'espère, la découverte des nouveaux espaces du département des Arts de l'Islam amènera à ressentir.
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La muséographie
La muséographie a été conçue par Renaud Piérard et Mario Bellini. Les mobiliers muséographiques ont été réalisés par la société Goppion.
Billet collections permanentes : 11 euros
Gratuit pour les moins de 18 ans, les moins de 26 ans résidents de l'U.E., les enseignants titulaires du pass éducation, les demandeurs d'emploi, les titulaires de cartes adhérents, ainsi que le premier dimanche du mois pour tous. Billet valable le jour même pour le musée du Louvre (excepté les expositions du hall Napoléon) et le musée Eugène-Delacroix.
- Horaires du musée du Louvre -
Ouvert tous les jours de 9h à 18h, sauf le mardi et le 1er janvier (fermeture des salles à partir de 17h30). Nocturnes jusqu'à 21h45 les mercredi et vendredi (fermeture des salles à partir de 21h30).
- Accès -
Pyramide et galerie du Carrousel : ouvert tous les jours sauf le mardi, de 9h à 19h30 et jusqu'à 22h le mercredi et le vendredi. Passage Richelieu : ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9h à 17h30 et jusqu'à 18h30 le mercredi et le vendredi.
- Comment venir?
En métro : lignes 1 et 7, station Palais-Royal/musée du Louvre /En bus : bus n° 21, 24, 27, 39, 48, 68, 69, 72, 81, 95
- Renseignements -
Tél. 01 40 20 53 17 - www.louvre.fr
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