Anne Sinclair, DSK - Comment aimer un mari qui trompe

par Dominic Anton, psychothérapeute

Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair, voici un couple qui questionne à la vue de l'actualité. Comment expliquer le soutien indéfectible d'Anne Sinclair à DSK ? Et, plus largement, comment aimer un mari qui trompe ? Dominic Anton, psychothérapeute et contributeur sur Leplus, le site participatif du Nouvel Observateur, émet des hypothèses autour de ces questions.

Comment expliquer le soutien indéfectible d'Anne Sinclair à DSK

Échange de baisers furtifs au tribunal, mise à disposition de sa fortune pour financer la liberté surveillée de son mari... Comment expliquer ce soutien indéfectible malgré l'opprobre ?



Un couple qui questionne à la vue de l'actualité, Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair. Comment cette femme qui a connaissance des frasques extra-conjugales de son mari peut-elle encore l'aimer ? Il est bien évident que cela concerne de nombreuses femmes. Le regard du public : 'Comment une femme aussi intelligente, sans aucun problème d'ordre matériel accepte une telle humiliation, qui plus est à la vue de la terre entière ?'





Petit rappel historique

Les importants changements liés à l'histoire de l'évolution de notre société occidentale ont influencé la façon dont les couples se créent, ainsi que les attentes de chacun.



Les deux guerres, les revendications sociales et la politique féminine qui s'ensuivirent ont généré un paradoxe important dans les relations de couple. La structure plus ancienne reposait sur un modèle qui donnait une place à l'un et l'autre des membres qui composaient le couple. À compter des années 70, il est projeté dans le couple d'allier plaisirs, liberté de choix, complicité, respect, sécurité, pérennité du couple, authenticité des sentiments et cohérence, tout ceci dans un fond culturel de monogamie.



Il est culturellement dans notre société implicite que le lien du mariage sous-entend la monogamie, et ce sur le principe religieux que le mariage est un acte sacré et donc un engagement total.



Il est important de noter que le mariage religieux tel que nous le pratiquons remonte dans l'histoire au 12e siècle. Qu'il est alors posé dans la construction d'une famille et, donc, que la sexualité ne peut être qu'un acte de reproduction, mais aucunement un acte de plaisir. La notion du plaisir dans la sexualité au sein du mariage ne sera accordée par l'Église qu'en 1962.



Il importe aussi de ne pas mettre de côté que, tout au long des siècles de cette morale ordonnatrice, le mariage reste un lieu de réalisation familiale, alors qu'il est fréquent que le plaisir sexuel aille se trouver à l'extérieur.
Avoir une femme mère de ses enfants et une maîtresse en dehors du lien du mariage.



Nous pourrions pointer le fait que les attentes et demandes ayant changé, il ne devrait pas y avoir aujourd'hui de fonctionnement à l'image d'autrefois. Ce serait alors nier la nécessité du temps pour tout changement de fonctionnement dans le cadre des avancées de l'humanité.



L'idéologie ne suffit pas à modifier un système vieux de plusieurs siècles : il est nécessaire pour notre espèce de passer par une transition progressive qui peut demander plusieurs générations avant que ne soient intégrés les nouveaux codes et nouvelles formes relationnelles.



Le cas de DSK et Sinclair qui soulève aujourd'hui à la vue de l'actualité de si nombreuses questions sur ce qui fait que cette femme, qui représentait il y a encore peu de temps un modèle féminin de liberté et réussite sociale, puisse aller à l'encontre de cette image tant idéalisée : être cette femme qui accepte tout, renonçant, ainsi à la face du public, à son propre ego.



Plusieurs questions se posent alors sur ce qui peut amener une femme pensée comme un modèle des mouvements de la libération de la femme à ainsi accepter de tels actes de son compagnon. L'amour, diront certains : est-ce là suffisant comme explication ? ou plutôt que représente le mot amour ?



Amour

À cette question, les réponses sont multiples, mais elles visent pour la plupart une finalité, un état, une façon de ressentir l'autre et de se sentir soi-même, des attentes, des espoirs, une projection d'une relation étroite où ne trône que la réalisation à deux d'une histoire merveilleuse.







Sans vouloir être trop terre à terre, il est difficile d'imaginer que le couple puisse être à lui seul l'espace des réalisations des deux. Rien n'est moins sûr que de penser qu'un couple est une forme relationnelle naturelle qui ne peut que fonctionner si on le décide : c'est un espace de fluctuations constantes, de remises en cause, de communication, de réalités individuées pas nécessairement partagées, un lieu où tout est possible mais avec cependant un regard des plus objectifs et surtout avec un renoncement à bien des idéaux.



Notre société est, dans ce domaine comme dans bien d'autres, dans un réel paradoxe. Il n'a jamais été avant ces dernières cinquante années plus question que de fidélité et d'une structure de couple où tout est possible. Et cependant nous n'avons jamais connu dans toute notre histoire une telle prépondérance à 'tromper' l'autre, et ce tout autant les hommes que les femmes.



Il me paraît cependant justifié que, face au contrat demandé au couple, à savoir 'Amour, Sexe, Égalité', l'on observe la courbe des divorces et séparations rapides de plus en plus croissante, tout autant que celle des relations extra-conjugales. Il est certain, en toute objectivité de notre environnement, que nous sommes face à un réel questionnement sur ce qui nourrit la mise en place d'une relation de couple et, avant tout, la réalité des éléments qui seraient sources de la réussite dans cette construction.



Hypothèse 1 —, Fascination

En regardant dans son ensemble l'histoire, Anne Sinclair se retire de son espace de réalisation professionnelle pour ne pas être en porte à faux avec la position politique de son mari. Or la place qu'elle occupait alors lui laissait tout le loisir de projeter une mise en place d'un nouveau système professionnel qui, sans poursuivre sur la voie première, l'autorisait à rester inscrite au regard des Français. À poursuivre sa carrière, exister dans son espace.



Cependant, son choix est de disparaître et ne plus être une personne publique au dépend de son mari qui, lui, poursuit son ascension.



Quels sont les déterminants qui peuvent amener une femme dans sa position à poser un tel choix ? Le seul qui m'apparaisse comme évident, c'est la fascination de l'autre, le percevoir comme un être exceptionnel et donc pouvant avoir un fonctionnement exceptionnel, et ce dans tous les domaines. Se sentir exister non plus dans 'ce que je mets en place', mais au travers de ce que développe l'autre : rester dans l'ombre tout en étant dans le lien toujours présente.



Peut-on parler d'équilibre relationnel, de mise en place qui soit un choix pensé, ou bien d'une conséquence d'un lien pathogène et totalement dépendant d'un fonctionnement affectif névrotique...?



Hypothèse 2 —, Acceptation de l'autre dans son ensemble

Un lien à toute épreuve supposerait que l'on ait développé une aptitude suffisante à accepter le partenaire tel qu'il est vraiment. On aborde alors un autre monde que celui qui est le nôtre. Le monde de notre partenaire qui n'est jamais identique et auquel s'adapter est essentiel.



Ce regard serait donc une vraie maturité affective où rien ne viendrait perturber notre état intérieur. Une sérénité absolue des sentiments que l'on perçoit tout autant qu'un parfait accord des attentes et partages avec l'autre. Cela entend d'accepter la différence et de renoncer à la symbiose. Être passé sans aucun doute par un travail de très grande profondeur sur soi. Une réalisation bien au-delà d'un sentiment, mais une acceptation de l'autre dans son ensemble.



Conclusion —, Construire à deux sa relation


Ces deux regards très rapides sur une forme relationnelle restent bien des projections d'analyse qui n'ont d'intérêt que dans les questionnements qu'ils peuvent susciter. Ce ne sont en aucun cas des réponses.



Il est toutefois essentiel de bien saisir que, seul, un sentiment ne peut en aucun cas être suffisant pour qu'une relation de couple puisse exister. En effet, même s'il reste important de ressentir et de sentir, cela ne reste qu'une infime part de ce qui autorise le couple, quel qu'en soit le modèle, à pouvoir faire durer son histoire.



Le constat n'est pas d'être à l'image de ce que certains nommeraient le pardon, mais à l'évidence d'accepter de ne pas répondre à une attente sociale et culturelle, et bien se donner les moyens de construire à deux sa propre relation, sans pour autant oublier que les deux individus qui la composent restent et gardent une individualité qui ne pourra jamais renoncer à son existence.





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A propos de Dominic Anton, psychothérapeute à Paris


Psychothérapeute et psychanalyste depuis plus de quinze ans, tant en milieu public que privé, Dominic Anton vous propose un espace d'écoute et de dialogue, un cadre interactif à la recherche de résultats efficaces vers un mieux être. Il vous permettra en quelques semaines une vraie dynamique subjective, laquelle se confirmera ensuite de ses effets dans le réel, personnel et professionnel.

- Membre de la Fédération Française de Psychothérapie et Psychanalyse (FF2P) : http://www.ff2p.fr
- Membre de l'association Resurgen : http://www.resurgen.org
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(Source : blog/site de Dominic Anton : http://paris-psychotherapeute.net)


Par Nicole Salez
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