Santo Domingo, République Dominicaine

Première capitale du Nouveau Monde

Son cœ,ur balance entre modernité à l'américaine et histoire coloniale... Santo Domingo, en République Dominicaine, est sans conteste une capitale à deux visages. Côté face, la plus vaste métropole des Caraïbes et l'une des plus grandes d'Amérique latine, affairiste et résolument tournée vers le futur , côté pile la première capitale du Nouveau Monde bâtie par les conquistadores espagnols, fière de ses racines historiques.

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Tous les Dominicains l'appellent familièrement « La capital » .... Rebaptisée Ciudad Trujillo de 1936 à 1961 sous la dictature de Trujillo, Santo Domingo s'étend sur quelque 80 km2. Elle abrite quelque trois millions d'âmes, une population jeune et sans cesse accrue par un exode rural qui repousse toujours plus loin les limites de la métropole, la cernant de quartiers grouillants de vie populaire.


Malgré sa façade sur la mer des Caraïbes, Santo Domingo n'est pas une ville maritime, le port Sans Souci n'a qu'une activité de plaisance très réduite et le mégaport, construit en 2000, concentre l'activité industrielle à une trentaine de kilomètres à l'est, non loin de Boca Chica.

Santo Domingo, la ville moderne
La ville moderne possède ses quartiers d'affaires, ses quartiers résidentiels chics et ultra sécurisés. La fin du XXe siècle a marqué l'ère des grands travaux dont le métro en grande partie réalisé par des entreprises françaises). Lacérée par les réseaux d'échangeurs, hérissée de buildings de verre et d'acier dont la hauteur tranche dans le panorama urbain, ponctuée de centres commerciaux aux enseignes internationales, Santo Domingo offre le visage ingrat et désordonné d'une architecture urbaine développée de façon opportuniste.

Quelques oasis de sérénité et de culture émergent de cette urbanisation chaotique. La Place de la Culture regroupe les principaux musées de la ville dont le Musée de l'Homme Dominicain.

Saint Domingue : le palais national ©Denis Verneau


Parmi les autres monuments notables, se trouvent le Palais National, siège du gouvernement, et le Théâtre National. Le parc du Mirador et le jardin botanique sont les poumons verts de la capitale. Le Malecón, large avenue de bord de mer, s'est refait une beauté et s'offre chaque dimanche aux promeneurs, joggeurs, skaters et cyclistes sur une large section fermée à la circulation.


Santo Domingo la coloniale

Saint Domingue : place Colon ©Denis Verneau


Tournant résolument le dos à la ville moderne, blottie contre l'estuaire du fleuve Ozama, se découvre une autre ville, sensuelle, tropicale, nonchalante, gouailleuse et populaire : Santo Domingo la séculaire, Santo Domingo la coloniale, première capitale du nouveau monde.

Saint Domingue : la fortesresse Ozama ©Denis Verneau


Inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco, le centre colonial est une ville dans la ville. Une fois franchie la limite des anciennes murailles qui défendaient la cité bâtie par les espagnols, c'est un autre monde qui se révèle : une ville fastueuse mais sobre, populaire mais noble, caribéenne mais espagnole.

D'emblée, on tombe sous le charme de cette somptueuse cité coloniale édifiée au cours du XVIe siècle qui regorge de joyaux d'architecture civile et religieuse. C'est un véritable livre ouvert sur les premiers temps de la colonie. Au fil des flâneries, le centre historique se redécouvre sans cesse, livrant ses secrets avec parcimonie, se laissant apprivoiser petit à petit.

Point de départ de la colonisation, le centre historique est aussi une clé pour appréhender toute la complexité du pays.


Une ville fondée en 1496

Fondée le 4 août 1496 par Bartoloméo Colon, le frère de Christobal, Santo Domingo fut certainement la plus majestueuse de toutes les villes que devaient fonder les conquistadores. Nicolas de Ovando en fut le principal architecte. Les institutions majeures des débuts de la colonisation s'y concentrèrent : le palais du vice roi des Indes, l'audience royale, l'université, l'hôpital, la cathédrale....

Palais, demeures nobles, églises, chapelles, monastères, forteresse et cloitres, se succèdent au fil des rues coupées au cordeau, répondant aux exigences du plan en damier typique de la colonisation espagnole.


Les édifices gothiques, nuancés de réminiscences romanes et arabes, parfois rehaussés de détails baroques, sont de toute beauté.


Placettes ombragées, patios secrets, enfilades de façades ouvragées, invitent à la flânerie. Blasons, lourdes portes en bois ouvragées, colonnades, fenêtres géminées, gargouilles, statuaire, le moindre détail architectural mérite le coup d'œ,il.

On arpentera avec respect la calle Las Damas, la plus ancienne rue pavée du nouveau monde où se succèdent les palais nobiliaires. On musardera de patio secret en placette pittoresque, on paressera à une terrasse de la Place d'Espagne face à l'Alcazar ou sur un banc la Grande Place d'Armes où se dresse la statue de Nicolas de Ovando, face à la première cathédrale du nouveau monde. On descendra la calle Hostos et son enfilade de cases créoles aux couleurs vives...


Sur l'esplanade de la Place d'Espagne, se dresse l'austère Alcazar de Colon, monument emblématique de la colonisation, siège de la cour du vice roi des Indes.


Non loin, le magnifique musée de las Casas Reales regroupe deux palais qui abritèrent l'audience et la trésorerie royales. Sur la Place d'Armes, la cathédrale Santa Maria la Menor, qui mêle des styles roman, gothique et Renaissance, a longtemps abrité les restes de Christophe Colomb qui repose aujourd'hui dans le phare qui lui est dédié.

Plus de 300 édifices civils et religieux dont une quinzaine d'églises et de couvents dédiés aux principaux ordres de l'époque ponctuent le centre. La pierre corallienne règne en maitre et habille la zone coloniale d'une lumière dorée, particulièrement belle en fin de journée. Dès le coucher du soleil, les réverbères à l'ancienne prennent le relais, auréolant la cité d'un éclairage chiche pour une discrète mise en beauté.



Une ville moderne et animée

Mais point de mélancolie ! La ville coloniale, loin d'être figée dans l'histoire, est animée au quotidien d'une vie turbulente et bon enfant. En remontant les collines qui dominent le fleuve, on butte sur les rues commerçantes, la Mella, la Duarte, grouillantes de vie populaire. Entrelacs de fils électriques, trottoirs encombrés de marchandises, coups de klaxon des guaguas surchargées de passagers...

Le Mercado Modelo, ancien marché alimentaire couvert inauguré par Trujillo, est devenu le marché d'artisanat : de la vannerie à la céramique en passant par la peinture et le travail du bois, on y trouve le meilleur de l'artisanat dominicain et haïtien.

Saint Domingue : ancienne porte des remparts ©Denis Verneau


Tout autour, les étals de fruits et légumes, de bondieuseries et herbes médicinales en tous genres ajoutent une note de couleur locale.

Des colmados s'échappent des flots de musique, le merengue ou la dernière bachata à la mode , le long du Condé, artère piétonnière emblématique du cœ,ur colonial, les démarches chaloupent, les rires et les apostrophes fusent, les œ,illades s'échangent , à l'ombre d'un acacia, quatre joueurs font claquer leurs dominos sur une table branlante.


En fin de journée, de petits étals bringuebalants envahissent les rues, sandwichs, hot dogs, hamburgers, jus de fruits, tandis que les ainés taillent la bavette au frais, alanguis dans une mesedora, la traditionnelle chaise à bascule , les amoureux disputent les bancs aux joueurs d'échecs, les terrasses de la Place d'Armes affichent complet...

Santo Domingo est une ville aux multiples visages, une ville en mouvement, dont l'énergie vitale et la joie de vivre se lisent partout.



Catherine Bardon et Denis Verneau sont les auteurs du livre 'République Dominicaine Terre métisse' publié aux Editions Géorama dont est extrait cet article.








Par Catherine Bardon

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