Bénévoles pour les malades en fin de vie
Jalmalv, une association pour le respect de la personne malade en fin de vie. Composée de bénévoles, en majorité des femmes, elle intervient dans les hôpitaux, et spécialements les unités de soins palliatifs, avec le seul désir de mieux considérer l'humain jusqu'au bout de la vie.
D'un côté, Thierry, 55 ans, fumeur depuis l'adolescence qui lutte contre un cancer de la gorge , Yasmina atteinte du vih pour laquelle la trithérapie n'a rien pu faire , Georgette, 95 ans, seule au monde dans sa maison de retraite , Clémence, 29 ans, en attente d'une greffe de foie au service d'hépatologie de Beaujon , Kevin, 12 ans, confronté à une leucémie à l'IGR.... De l'autre côté, Véronique, une jeune femme de 36 ans dans la vie active , Marie Christine, mère de quatre garçons , Alix, mère au foyer qui élève son enfant , Jean Paul, un jeune retraité. Apparemment, il n'y a rien de commun entre toutes ces personnes issues d'horizons très différents , si ce n'est un petit fil qui les réunit, le fil de la Vie. Graves malades, personnes très âgées, actifs ou retraités bénévoles réunis pour des rendez-vous hebdomadaires où, pendant trois heures, l'un est seulement à l'écoute de l'autre pour l'aider à mieux affronter le passage vers le grand vide proche pour certains, l'au-delà, l'infini ou le paradis, le nirvana pour d'autres.
Une association à forte majorité féminine
Comment les uns et les autres se sont ils rencontrés ? Simplement par le biais de l'association Jalmalv, Jusqu'à La Mort, Accompagner La Vie. Cette association regroupe des bénévoles ( 80 % de femmes environ pour 20 % d'hommes) qui acceptent, après une formation spécifique, de donner une demi-journée par semaine pour accompagner des personnes en fin de vie. On est loin souligne Marie-Odile de Vaugrigneuse, vice présidente de la Fédération Jalmalv, de l'image « œ,uvre de charité - dame patronnesse - bourgeoise bon chic bon genre » des années 70. Les bénévoles sont de plus en plus jeunes et encore dans la vie active. Ce qui prouve bien que les mentalités changent, que le tabou de la mort s'estompe, que tout un chacun se sent concerné.
Le respect de l'être humain jusqu'à son dernier souffle de vie
Mais quel est l'objectif de l'association ? Il s'agit avant toute chose d'aller vers la personne en fin de vie , de l'accompagner par une écoute vers ce passage à la mort, en liaison et en accord avec le personnel soignant qui voit là et espère une meilleure acceptation de la souffrance. Rien n'est imposé, tout est proposé, le malade peut refuser à tout moment une rencontre , mais à sa demande, selon le souhait du personnel soignant qui a parlé au malade de la possibilité d'un accompagnement , les bénévoles sont dans une seule et simple présence active auprès du malade, une compassion attentive à l'autre. De manière apolitique, non confessionnelle, totalement laïque, le bénévole écoute et laisse le malade parler. L'un raconte sa vie d'enfant, l'autre son amour pour ses enfants, le troisième son amertume d'avoir été abandonné par sa femme, le quatrième sa peur viscérale de souffrir plus encore, etc... De son côté, le bénévole écoute sans prendre position, c'est une éponge qui prend sur lui les paroles de l'autre prononcées à un moment donné. Il n'a pas à imposer un point de vue familial, religieux, politique ou médical , autour du malade, d'autres personnes sont là, médecins, prêtres de l'aumônerie, personnel administratif, membres de la famille, pour apporter des solutions aux problèmes de la vie. Le bénévole agit en toute confidentialité , aucune des paroles entendues ne sera retransmise, ce qui pousse le malade à être dans un état de total liberté d'expression.
Simplicité et humilité
Récemment, dans l'unité de pédiatrie de l'IGR, a été créé un groupe de parole pour les enfants malades eux-mêmes ou ayant un ami, un parent gravement malade. Jalmalv a l'intention d'ouvrir ainsi un lieu qui accueillerait n'importe quel enfant confronté à la souffrance de son proche. Cela peut être votre enfant quand son meilleur ami est hospitalisé, votre nièce qui au quotidien vit l'enfer d'un père trachéotomisé, votre cousin dont le père est emporté par un cancer de la peau. Chaque nouvelle initiative est un pas de plus, une avancée supplémentaire vers une meilleure humanité.
Mais qu'est-ce qui pousse ces femmes à donner ainsi de leur temps à l'autre ? Christelle, cadre dans un grand laboratoire pharmaceutique parisien, avait été touchée par l'accompagnement dont sa grand-mère chérie avait profité pendant près de six ans , Elisabeth poursuit un travail personnel de deuil après deux avortements , à l'opposé, Yasmina a été choquée de la manière inhumaine dont on a traité son père en fin de vie et entend mettre du sien afin que d'autres personnes vivent mieux leur fin de vie. Pour Nathalie, cette mère de trois enfants bénévole dans l'équipe de soins palliatifs de l'hôpital Saint-Joseph, il suffit de s'asseoir à côté du patient, de lui prendre la main, de l'écouter. Et cette démarche, ces heures volées au train-train quotidien, ce temps accordé gratuitement à l'autre l'apaisent, lui apportent une profondeur humaine, un autre regard sur la douleur dont elle a pris connaissance à la lecture du livre « La mort intime » de Marie de Hennezel.
Avec simplicité et humilité, toutes ces femmes accompagnantes reconnaissent qu'elles apportent seulement un peu de légèreté au poids de la vie et de la souffrance. Entre elles, elles sont solidaires, complémentaires , chaque malade étant vu par deux ou trois personnes de l'équipe , ce qui lui offre une grande diversité. Dans cet accompagnement par équipe, elle sont unies par un même désir de mieux considérer l'humain jusqu'au bout de la vie.
A Gustave Roussy, à domicile, dans une maison médicalisée, dans une unité de soins palliatifs , toutes ces femmes trop souvent ignorées ou méconnues oeuvrent sans attendre l'ombre d'un remerciement. Mais au-delà du soutien moral qu'elles apportent au quotidien , elles-mêmes et l'association font progresser aux yeux du public et des pouvoirs publics la nécessité d'une prise en charge globale du malade. Soutenir les soignants, favoriser les soins palliatifs, promouvoir la recherche, tels sont encore les buts recherchés par ces bénévoles. En effet, la volonté du fondateur du mouvement Jalmalv, le professeur René Schaerer, était d'apporter un regard différent à la personne en fin de vie, de reconnaître en lui un humain à part entière, là où l'attitude habituelle est plutôt de faire naître un sentiment d'indignité , cette indignité conduisant au désespoir, à l'exclusion, voire même à la mort du malade.
Pour les jeunes enfants
Dans quelques mois, la Fédération, Marie Odile de Vaugrigneuse et ses équipes fêteront les 20 ans d'existence de la Sfap, la société française d'accompagnement de soins palliatifs. Vingt ans pendant lesquels beaucoup de choses ont changé, même s'il reste encore à faire, si les services hospitaliers réclament encore des bénévoles. Mais cette bénévole là, dont la modestie est de dire qu'elle n'est pas une professionnelle de l'accompagnement, mais une simple personne qui a acquis quelques compétences d'accompagnement, le dit haut et fort : « Dites à vos lecteurs que nous ne parlons que très peu de la mort. L'accompagnement n'est pas forcément triste et lourd aussi bien pour le malade que pour le bénévole. La Vie est là malgré la souffrance et elle est encore joie et rires ». Quand l'équipe se réunit pour débattre, confronter les échanges malades-bénévoles , nombreux sont les moments de rire partagés. D'ailleurs, Marie-Christine peut en témoigner et ses amis bénévoles l'attestent : face à cette mignonne petite blonde aux yeux azur, toutes les personnes ( surtout les hommes !! ) parlent, communiquent, se lâchent. Comme quoi, même quand on sait que la fin de vie est proche , on cherche encore et toujours à séduire, à plaire ou tout simplement à éprouver une dernière fois encore, un sentiment d'amitié. Jamalv est cet ultime rayon de soleil qui illumine les yeux des plus faibles et qui réchauffe le cœ,ur des bien portants. Et si, vous aussi, vous vous intéressiez à l'autre ? Cela serait peut-être le début d'une autre vie...
Tel: 01 40 35 17 42
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