Y a-t-il un avenir professionnel après 45 ans ?
Rendre obligatoire un bilan de carrière dès 45 ans pour tous les salariés, telle est la mesure préconisée par le rapport sur l'emploi des seniors intitulé 'Y a-t-il un avenir professionnel après 45 ans ?', remis par le Député-Maire Jacques Kossowski, le 22 octobre, au Ministre de l'Emploi Xavier Bertrand et au Secrétaire d'Etat à l'Emploi Laurent Wauquiez. A vous de juger.
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Question : quand devient-on « trop vieux » par rapport à l'emploi ?
'Il n'existe évidemment pas de réponse à cette question. En tout cas pas de réponse
définitive. Mais une chose est sûre : on devient trop vieux de plus en plus jeune !, constate Jacques Kossowski, en introduction du rapport
*Le rapport collectif mené par Jacques Kossowski « Y a-t-il un avenir professionnel après 45 ans ? » résulte d'une centaine de rencontres avec des représentants du monde de l'entreprise, des syndicalistes et des chercheurs d'emploi de plus de 50 ans. Chaque entretien a confirmé l'état des lieux suivants : le chômage des seniors - ce chômage qui est d'abord lié à l'âge —, concerne malheureusement les salariés de plus en plus tôt , de plus en plus jeunes. Souvent dès 45 ans, parfois même dès 40 ans.
« La conséquence s'impose donc d'elle-même : on ne résoudra ce problème qu'en s'y attaquant le plus en amont possible, c'est-à-dire à 45 ans, à un âge où -professionnellement - tout reste encore possible. », déclare Jacques Kossowski.
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Il n'y a pas si longtemps, poursuit-il, les salariés étaient considérés comme des seniors à 55 ans.
Aujourd'hui, on est « trop âgé » dès 45 ans, voire dès 40 ans.'
Selon lui, il faut donc agir dès 45 ans en mettant en place un bilan de carrière obligatoire. Ce dispositif doit être réalisé par des organismes privés - mais certifié par le Ministère du travail - dans le cadre du DIF (Droit Individuel à la Formation), et placé sous la tutelle des régions, véritables bassins d'emploi.
Pourquoi un bilan de carrière
obligatoire ?
Pour s'adapter au marché du travail, il faut avoir fait le point sur ses connaissances,
son expérience, ses aspirations... Le problème, c'est que la plupart des salariés ne
le font pas, et que s'ils en manifestent le désir, ce n'est pas forcément reçu comme un
signe positif par l'entreprise. Seconde raison —, et non des moindres —, le caractère
obligatoire du bilan de carrière repose sur un principe élémentaire d'équité, tant vis-à-vis
des entreprises que des salariés : il n'y a aucune raison pour que certains adoptent le
dispositif et d'autres pas.
Pourquoi à 45 ans ?
Au moins pour deux raisons. La première, c'est que 45 ans constitue de l'avis général
un vrai tournant professionnel. C'est à cet âge là que tout est encore possible. Deuxième
raison : tous les chiffres montrent que c'est paradoxalement à 45 ans que l'accès à la
formation chute de manière vertigineuse.
Pour quoi faire ?
C'est une chose de changer d'entreprise (ce qui est beaucoup plus fréquent aujourd'hui
qu'il y a 20 ans). C'en est encore une autre de pouvoir exercer un nouveau métier.
Surtout à la cinquantaine. Or, après 20 à 25 ans dans le même secteur, on peut
légitimement aspirer à opter pour une nouvelle orientation professionnelle. Un des
objectifs du bilan de carrière c'est de donner une formation à tous ceux qui veulent faire
un autre métier. Mais cela peut être aussi de rassurer un salarié sur son adaptabilité aux
évolutions futures ou de lui offrir les moyens d'y faire face en recourant, là encore, à une
formation qualifiante.
L'objectif du bilan de carrière c'est de faire le bilan
au bon moment. Quand tout est encore possible.
Pour s'adapter à de nouvelles évolutions ou
pour changer de métier
Par qui doit-il être réalisé ?
Evidement pas au sein des entreprises, car ce bilan doit être le plus neutre possible à
l'égard du salarié. Faut-il pour autant en confier la réalisation à des sociétés privées ?
En ces temps de restriction budgétaire, il n'existe pas d'autre solution, estime le rapport. Mais les pouvoirs
publics doivent être exigeants sur la méthodologie du futur bilan de carrière. Cette
méthodologie doit même faire l'objet d'une certification par le ministère du Travail et de
contrôles réguliers par les organismes collecteurs (OPCA). C'est en partie ainsi que le
futur bilan de carrière obligatoire peut acquérir la crédibilité nécessaire auprès des salariés.
Le bilan de carrière sera réalisé par
des entreprises privées, mais selon
une méthodologie qui devra être
certifiée par le Ministère du Travail
...dans quel cadre ?
Le cadre existe : depuis 2005, les entreprises de plus de 300 salariés doivent engager tous
les trois ans une négociation sur la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences
(GPEC). Pour les entreprises, l'élaboration de ces plans vise un double objectif : adapter les
effectifs par métier en fonction de l'évolution du marché , renforcer les compétences des
salariés pour leur permettre d'évoluer dans leur fonction ou de changer de poste. Il faut noter
que les GPEC sont le cadre idéal pour avoir une réflexion importante sur la place des seniors
dans l'entreprise, poursuit le rapport. Bien sûr, en anticipant les départs à la retraite qui, on le sait, vont être
particulièrement nombreux dans les prochaines années. Mais aussi en préparant les salariés
à l'allongement de la vie active.
Doit-il concerner les
petites entreprises ?
C'est évident ! Mais, attention, l'obligation de négocier un GPEC est un processus
relativement lourd : il ne concerne donc logiquement que les sociétés les plus
importantes. Comme les pénalités applicables fin 2009 aux entreprises qui n'auront pas
fixé d'objectif sur l'emploi des seniors. Les petites et moyennes entreprises ne seront
pas concernées. Certes par réalisme, pour ne pas les pénaliser. Mais n'oublions pas
que les TPE et PME concentrent aujourd'hui 96% de l'emploi en France ! C'est
pourquoi le bilan de carrière doit être, quant à lui, obligatoire pour tous les salariés et
pour toutes les entreprises sans, bien sûr, que cela représente une nouvelle charge.
Parler de l'emploi des seniors dans les entreprises
de plus de 300 salariés c'est bien. Mais n'oublions pas
que 96 % des emplois sont dans les entreprises de
moins de 10 personnes.
Pourquoi le gérer à l'échelon régional ?
En premier lieu parce que les régions correspondent aux bassins d'emploi et que les
salariés sont attachés à leur lieu de vie. Mais les régions n'ont pas seulement l'avantage
de représenter l'échelon économique le plus pertinent (à l'exception de l'Ile-de-France
où l'échelon départemental semble plus adapté) : elles ont de par leurs compétences en
matière de développement une réelle légitimité pour réunir l'ensemble des partenaires
(dont la délégation régionale de la future ANPE) et centraliser les besoins des entreprises.
Dernière raison, et non des moindres : la région est la collectivité d'avenir.
Comment financer le dispositif ?
Que les entreprises se rassurent : il n'est pas question que le bilan de carrière obligatoire
à 45 ans induise des coûts supplémentaires. Elles payent déjà bien assez pour la
formation continue qui est est - disons-le à nouveau - un vrai scandale, un de ceux qui
concerne des millions de Français. 24 milliards sont dépensés, on ne sait trop comment,
sans profiter à ceux qui en ont le plus besoin. Et ils sont nombreux parmi les seniors !
Il faut donc tout remettre à plat. La gestion de cet énorme budget, bien sûr. Mais sa
finalité, également. La moindre des choses c'est que la formation continue permette de
progresser, mais aussi de rebondir à un moment charnière de la vie professionnelle, en
particulier à 45 ans. De plus, il faut qu'elle soit beaucoup plus qualifiante qu'elle ne l'est
aujourd'hui. C'est-à-dire clairement basée sur la réalité du marché du travail.
Débouche-t-il
forcément sur une formation ?
Non. Autant le bilan de carrière doit être obligatoire, autant la formation proposée à
l'issue de ce bilan doit être demandée par le salarié et être acceptée par l'entreprise
(en cas de refus, celui-ci devra être motivé). Pour étayer sa demande, le salarié doit
mentionner dans son bilan de carrière les filières d'emploi les plus porteuses de son bassin
d'emploi (voir ci-dessous). Concernant la formation proprement dite, le plus simple est
d'utiliser un outil existant qui est le DIF (Droit Individuel à la Formation). Rappelons pour ceux
qui l'ignorent que cette formation permet à tout salarié de se constituer un crédit d'heures de
formation de 20 heures par an, cumulable sur six ans dans la limite de 120 heures. Il suffit
donc d'assimiler la formation issue du bilan de carrière à un DIF en demandant aux entreprises
de laisser cette formation se dérouler sur un an seulement (ce qui équivaut à 12 heures par
mois). Il faut également être plus exigeant sur le caractère qualifiant de cette formation.
Si le salarié le souhaite et si l'entreprise l'accepte,
le bilan de carrière constituera une formidable opportunité :
celle d'envisager une nouvelle vie professionnelle
Choisir une formation
pour changer de métier ?
Même s'il est perfectible, un outil existe : les « Besoins en Main d'Oeuvre ». Ces enquêtes
régionales sont réalisées par l'Assurance chômage chaque année. Elles mesurent les projets
de recrutements par bassins d'emploi et par métiers. Grâce à cet outil, il est possible de prendre
connaissance des besoins en main d'oeuvre, par filière d'activité et grand bassin d'emploi.
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