Un rapport de la commission présidée par Michèle Reiser
Les femmes sont souvent 'invisibles' dans les médias en France, telle est la conclusion du rapport, remis le 25 septembre, de la commission de réflexion sur l'image des femmes dans les médias présidée par Michèle Reiser. Les pistes d'actions préconisées: création d'une mission d'observation des stéréotypes féminins, analyse de ces stéréotypes, lancement d'un projet de monitorage des médias au niveau européen.
Alors que l'on parle d''explosion des femmes' dans la société française, enfin ! les medias ne suivent pas, ou peu, ou mal. Quand aux quelques femmes 'visibles' des medias, en particulier en télévision, elles le sont souvent en raison de leur aspect physique, de leur côté sexy, voire 'people', plus que pour leurs compétences, même si celles-ci sont parfois réelles. Question d'image de la femme en France. Bref, on est loin, par exemple, des États-Unis où les 'vedettes' des medias ressemblent davantage à Madame Toulemonde.
'Invisibles' et 'inaudibles'
En conclusion, malgré des avancées notables, les femmes demeurent souvent, selon les mots du rapport, 'invisibles' ou 'secondaires' dans les médias. Selon la commission, le taux des femmes dans les médias est de 37 % (enquête CSA). La commission a aussi relevé que les femmes ont moins de temps de parole que les hommes. 'En libre antenne, les femmes ont 7 % de temps de parole sur NRJ, pour 93 % pour les hommes', fait valoir Michèle Reiser dans un entretien donné, le 25 septembre dans Le Parisien. Autre exemple, en presse écrite hebdomadaire, 10 % d'articles sont consacrés aux femmes contre 50 % aux hommes qui font aussi l'objet de trois fois plus de photos.
Les propositions d'actions
Toujours selon Michèle Reiser, bien 'qu'en grande partie inefficace', 'l'arsenal législatif est déjà abondant'. Privilégiant le dialogue et la pédagogie, la commission qu'elle préside, préconise des pistes d'actions :
- Création d'une mission d'observation et de suivi des stéréotypes féminins
Elle sera chargée de suivre les avancées réalisées sur la base d'un rapport annuel des responsables des médias. Un correspondant sera désigné dans chacun des médias afin d'établir un contact pérenne.
- Inscription d'une analyse des stéréotypes féminins dans le cadre de l'éducation aux médias menée par l'Éducation nationale
La politique de prévention et de sensibilisation est un enjeu important. Un volet de décryptage des stéréotypes dans les médias sera intégré dans la Convention interministérielle pour la promotion de l'égalité entre les filles et les garçons.
- Lancement d'un projet de monitorage des médias au niveau européen
Dans le cadre de la PFUE (Observatoire de la Présidence Française de l'Union Européenne), lancer un projet européen pour analyser les messages et images télévisuels, à l'instar du projet 'screening gender' lancé par la Finlande en 1998.
Rappel
C'est en mars dernier que Valérie Létard, secrétaire d'Etat chargée de la Solidarité, auprès du ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité, chargeait Michèle Reiser, membre du CSA, de constituer une commission de réflexion sur l'image des femmes dans les médias.
Dans le cadre de la politique de promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes, la commission de réflexion a étudié la manière dont l'image de la femme était représentée dans les médias. Devant le constat d'un décalage entre le rôle et la place reconnus aux femmes dans la société et les stéréotypes qui lui sont assignés, la commission s'est attachée à comprendre pourquoi et comment l'image de la femme dans les médias souffrait d'un tel décalage.
La télévision, la radio, la presse et la publicité ont été analysées par des chercheuses spécialisées en sémiolinguistique. Les travaux se sont également appuyés sur l'audition de professionnels des médias, d'institutionnels, d'associations et de chercheurs spécialisés dans les médias. Enfin, des comparaisons ont été menées avec des expériences faites dans d'autres pays.
3 enjeux fondamentaux
Les grands axes privilégiés par la commission correspondent aux 'trois enjeux fondamentaux de la modernité des femmes' :
- l'accès au travail et au savoir ,
- l'articulation des vies professionnelles et familiales et le soin des enfants ,
- le rapport au corps et au désir.
Les principaux chapitres du rapport
PREMIERE PARTIE : ROLE ET RESPONSABILITE DES MEDIAS
I. MEDIAS ET IMAGE DES FEMMES : UNE RESPONSABILITE ET UNE OPPORTUNITE
- Médias et construction des rapports sociaux
- Les médias ou la moitié de notre vie
- Les médias sont des passeurs
- La menace du stéréotype
- Les nouvelles frontières des représentations
- De profondes mutations mais des aspirations non homogènes
- L'opportunité d'un tournant économique
- Une mutation profonde du paysage médiatique
- Ennuyer ou choquer les prescriptrices des achats est le vrai risque économique
II. LES QUATRE PILIERS DE LA REGULATION : UN JEU D'ACTEURS
- Les pouvoirs publics : une absence de soutien au droit de communication des femmes
- Un cadre juridique développé mais non utilisé
- Une politique de prévention insuffisante
- Les instances de régulation
- Le Conseil supérieur de l'audiovisuel : présence des outils de régulation, absence des
femmes
- L'Autorité de régulation professionnelle de la publicité : des avancées mais la persistance
de points noirs
- Le Forum des droits sur l'internet : une jeune instance confrontée à de très lourds enjeux
- Les acteurs économiques
- Une incontestable présence d'outils de régulation interne
- Une absence d'accroche de la question spécifique de l'image des femmes
- La société civile : une faible mobilisation hormis les minorités actives
- Les actions sociétales
- Les actions en justice
DEUXIEME PARTIE : UN BILAN EN DEMI-TEINTES
I. DE CONSIDERABLES AVANCEES : « Les femmes sont bien là... »
- Dans les organisations des médias : une présence qui ne cesse de croître
- Une progression continue de la place des femmes
- Une volonté managériale affichée
- Dans le contenu et usage des médias : une évolution de l'image des femmes et des pratiques
- La publicité : de la ménagère à la manager de sa vie
- La télévision : images multiples, temps équivalents
- La révolution de l'expression directe : la libre antenne à la radio ou le lieu de liberté des
adolescents
- La presse féminine ou l'accompagnement ciblé des lectrices
- Internet libère la femme
II. MAIS UNE PLETHORE D'ARCHAISMES ET D'ATTEINTES A LA VALEUR DES
FEMMES : « Les femmes demeurent souvent invisibles ou secondaires. »
- L'approche quantitative ou la vérité sans fard des chiffres : une infériorité numérique tous
médias confondus
- Le projet mondial de monitorage des médias
- L'enquête spécifique de la France
- Le document provisoire de l'enquête sur la diversité du CSA
- L'analyse des trois corpus, radio, presse, télévision (le corpus GMM)
- L'approche qualitative : un statut secondaire et une invisibilité des thèmes de la modernité
des femmes
- Un statut de seconde zone : passantes ou ombres chinoises
- L'invisibilité des sujets de la modernité des femmes : accès au travail, au savoir et à la
conciliation de la vie familiale et professionnelle
- Une pondération variée des différentes rubriques
- Une quasi absence des thèmes de la modernité des femmes
- L'assignation à un modèle unique: une normalité du corps et du sexe qui joue comme
normativité
- Un corps unique
- La dictature du sexe
- Une mixité en trompe l'oeil : un conformisme général qui perpétue les stéréotypes de genre.
- La presse : une construction insidieuse des identités sexuées et des rapports sociaux de sexe
- Internet : une invitation massive au conformisme de genre
- Violence des propos et cyberchantage sur les filles
- Les jeux vidéo : des avatars féminins caricaturaux
- Les sites pornographiques : un harcèlement tous publics
- La double allure de la publicité : à la fois en avance et en retard
- La libre antenne : des héroïnes très secondaires
- La télévision : l'uniformité par recherche à tout prix du consensus et l'assèchement de la
créativité des auteurs
- Les femmes dans les médias : une majorité peu visible
- La grande absence/présence des femmes dans les organisations
- Une part limitée dans la fabrication de l'information
- Une absence des postes stratégiques
TROISIEME PARTIE : LES PROPOSITIONS
- Les mesures de lancement de la démarche
- L'inscription de cette démarche dans la durée
ANNEXES
- Le corpus GMM : les trois corpus radio, presse et télévision
- Compte rendu des auditions par le Service des droits des femmes et de l'égalité
- Notes sur les enjeux de la régulation des médias
- Note du CSA
- Note de la DDM
- Note du Forum des droits sur l'internet
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Le rapport complet
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