Les Cévennes baba-cool

Les Cévennes, à partir des années de l'immédiat après-68, furent notre Katmandou national. Peace and Love, power-flower, quelles hordes pacifiques et déjantées n'a pas vu défiler cette terre protestante belle et rude. Jusqu'aux Rolling Stones qui y ont acheté leur résidence secondaire. Quarante ans après, que reste-t-il de nos amours cévenoles ?



Bien que le mouvement soixante-huitard y subsiste plutôt à l'état de souvenir, quelques hippies de la première heure sont restés là, entre mont Lozère et mont Aigoual, entre grands causses et vallées cévenoles. Beaucoup, venant de grandes villes, ont fini par y retourner, devenant « chèvres » à force de vouloir en élever sans être du métier. Une nouvelle génération, celles des enfants et petits-enfants s'y installent aujourd'hui attirés par certains habitats à rénover et relativement accessibles et par l'authenticité de la nature. Ils y recherchent une autre flower-power, celui de l'agriculture raisonnée, du développement durable et du tourisme vert. RMI aidant, on peut vivre dans cette région où la vie quotidienne ne nécessite pas de moyens excessifs et où quelques travaux saisonniers suffisent, dans certains cas, à arrondir les fins de mois. Même si cette attitude laxiste n'est pas nécessairement du goût de certains vieux Cévenols ayant passé leur vie entière à travailler dur. Autres temps, autres mœ,urs......

Les années 70 ont pourtant laissé des traces jusqu'à la génération actuelle à travers de multiples petits indices.
Attablée au restaurant du village médiéval de Vézénobres accroché sur un piton rocheux de plus de 200 mètres, Gabrielle Cespedes est fière de son village-camping de vacances naturistes, du domaine de la Sablière, qu'elle a créé avec son mari, en 1975, avec son mari, (www.villagesablière.com ) en surplomb des gorges du Cèze.

L'idée avait germé après avoir passé l'été 1968 au bord de la Cèze « en camping sauvage avec notre petite 2CV et en nous informant, simplement, auprès du premier agriculteur que nous avons rencontré ». Autre soixante-huitard resté dans les Cévennes, Serge Humbert à la fois facteur et apiculteur à Estréchure, parti avec 4 de ses amis en 1973 de Lorraine pour vivre, ici, en communauté. Elevage et agriculture communautaires ont fini par faire éclater la petite communauté et les préoccupations, notamment environnementales, ont fini par avoir raison de l'insouciance et des utopies des années 70. Les Cévennes ont également retenu Anne Nourry, Présidente de l'association « Sur le Chemin de Stevenson », accompagnatrice de moyenne montagne. Originaire de Reims, elle est arrivée, en 1975, dans les Cévennes, âgée de 17 ans avec la volonté de prouver qu'il était possible de vivre autrement, en harmonie avec la nature... Avec 5 de ses amis, elle a vécu en communauté du coté du Mont Lozère, avant de travailler pour une agence de voyages parisienne comme accompagnatrice et conceptrice de voyages à travers le monde. Le rêve cévenol s'est, cependant, poursuivi, après interruption, puisque Anne Nourry y est revenue depuis 15 ans pour retrouver l'esprit des années 70. Elle est àl'origine de la mise en valeur de l'itinéraire Cévenol de l'écrivain Robert Louis Stevenson (« Voyage en Cévennes avec un Ane », « Mr Jeckyll and Mr Hyde ») et participe aujourd'hui au rayonnement de ce chemin de grande randonnée (GR 70).


Nouvelle génération, nouvelles motivations

Finies les communautés. Aujourd'hui les Cévenols voient arriver une nouvelle migration, moins utopiste, plus raisonnée. La nouvelle vague, celle des années 2000 recherche davantage un équilibre individuel, plus proche d'un ermitage que d'une vie communautaire. Et pourtant, comme à l'époque des années 70, elle a en commun avec les hippies de ces années là, le rejet de la ville, de la surconsommation et la volonté d'un retour à une vie plus authentique, plus simple. Si une nouvelle génération vient s'installer là, c'est parce que les parents, parfois, avaient fait le chemin avant eux, avaient vécu là quelques temps en Cévennes et ont transmis leur rêve d'une vie meilleure à leurs enfants. Nombre d'entre eux n'ayant pas réussi à s'acclimater vraiment, étaient retournés vers les villes mais leurs enfants auront, peu ou prou, été bercés par ce qui fut, pour les uns une illusion, pour les autres, une réalité de vie alternative. Et cet héritage idéologique s'est parfois transmis.



Les parents de Bernard Perrier avaient déjà fait un retour à la terre du côté de Saint André de Valborgne mais ils ont repris le chemin de la ville. Il y avait peu de chances de prime abord, pour que Bernard Perrier devienne apiculteur au Fesquet à 450 m2 d'altitude. Il était responsable commercial de secteur dans l'une des plus importantes sociétés de l'industrie alimentaire. Lorsque sa direction lui a demandé de venir s'installer au siège parisien en lui accordant une promotion, il a, de mauvais gré, tenté l'aventure. Pas très longtemps. Pression, réunions à répétition, ambiance challenge et le reste ont tôt fait de le décourager. S'installer dans les Cévennes, qu'il connaissait depuis l'enfance, devenait un horizon d'autant plus probable que son épouse, Nathalie, fonctionnaire dans l'administration préfectorale, rêvait depuis toute jeune, d'avoir une ferme.
Ils se sont installés en 2002. Après avoir fait, lui, un stage d'apiculteur, elle un stage d'élevage de chèvres et de fabrication de fromages, ils ont pris racine avec leurs trois enfants. Avec ses quelque 300 colonies d'abeilles, Bernard récolte et vend du miel de châtaigner, de bruyère, de lavande et produit de délicieuses guimauves, nougats, madeleines, pains d'épices au miel. De son côté, son épouse, s'est mise à la tête d'un troupeau de 30 chèvres qu'elle emmène au pâturage tous les jours durant trois heures à travers les sentiers escarpés, avant de les traire et de confectionner le célèbre Pélardon. Longues heures de travail souvent astreignant, climat hivernal rude ne leur font pas peur. Même s'ils vivent plus modestement que par le passé, leur joie de vivre ici, en pleine nature préservée, se lit sur leurs visages.


Peace and love sous le Tilleul

Au Tilleul, ou plutôt chez Leni



Leni règne sur sa cuisine et ses confitures

Même esprit chez Leni Chevasson, ex-monitrice de ski puis cuisinière pour les équipes de cinéma et de théâtre, qui vous ouvre ses portes, sa chaleur et son réseau relationnel surprenant dans son restaurant avec chambres d'hôtes. Il faut dire que son itinéraire personnel n'a rien de sédentaire, passant de Lyon à Hollywood sans compter Paris et la Bourgogne. Depuis 1995 une envie de campagne authentique a conduit ses pas vers ce restaurant Le Tilleul, dont elle a fait une table bien particulière. Une nourriture abondante, saine et délicieuse qu'elle concocte dans sa grande cuisine à laquelle les clients ont accès pour discuter avec elle. Gens de cinéma, de théâtre, amateurs de tourisme vert se succèdent ici en toute décontraction dans une ambiance quasi familiale. Ses deux chambres ont le même esprit un peu Bourgeois-Bohême, de très bon goût mais simples et bon marché. Il y a dans ce lieu la générosité d'un esprit de partage qui n'est pas sans rappeler l'esprit communautaire développé après 1968. Et puis, chose importante, Leni est la reine des confitures. Elle en a fait un livre paru aux éditions du Rouergue : Confitures, Compotes Chutneys et friandises, illustré avec bonheur par Agnès Maloine

La magnifique Bambouseraie d'Anduze vieille de 150 ans à ne manquer sous aucun prétexte se trouve à deux pas. Muriel Nègre, sa présidente et descendante de Gaston Nègre qui hérita du jardin exceptionnel créé par Eugène Mazel botaniste et jardinier à partir de 1856, veille à ce parc exotique unique en Europe. En passant devant le Pavillon de thé, le village laotien tout en bambou ou le jardin japonais, on se prend à rêver d'ailleurs. Mais finalement, les Cévennes sont un exotisme en soi.

Le tilleul : www.tourisme-gard.com/tilleul/


Les incontournables :



Pour goûter de la haute gastronomie à prix très raisonnable et séjourner dans l'une des 10 chambres de charme de Laurent et Séverine Carlier à Saint-André de Valborgne, visitez leur site www.restaurant-bourgade.com et surtout, visitez leur table. C'est une divine surprise en plein coeur des Cévennes.

Pour une journée hors du monde pour petits et grands, voir la Bambouseraie à Générargues-Anduze et faites vous en une idée sur le site :
www.bambouseraie.fr




Par Evelyne Dreyfus

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