La « directive retour » adoptée par le Parlement européen
Le Parlement européen a adopté le projet de directive relative aux normes et procédure communes applicables au retour des immigrants en séjour irrégulier, dite « directive retour », à Strasbourg, le 18 juin. L'adoption de cette directive constitue la première étape d'une future politique d'immigration européenne.
Des normes minimales communes
La directive vise à encourager le 'retour volontaire' des immigrants illégaux en harmonisant les conditions de retour et en établissant certaines garanties. Elle établit ainsi une durée de rétention à ne pas dépasser, et introduit une interdiction de retour dans l'UE pour les personnes expulsées.
Le traitement des étrangers en situation irrégulière devra ainsi répondre à des normes minimales communes. La directive interdira aux Etats d'appliquer des normes moins favorables aux immigrants illégaux —, tout en leur laissant la liberté de maintenir ou d'adopter des normes plus favorables. La directive ne s'applique que lorsqu'une décision de retour a été prise, et laisse à chaque Etat membre la responsabilité de régulariser ou non les sans-papiers.
Une durée de 6 mois maximum de rétention, de 5 ans maximum d'interdiction de réadmission
Le texte adopté introduit une période de retour volontaire à un délai allant de 7 à 30 jours. La durée de rétention serait de 6 mois maximum, mais extensible de 12 mois supplémentaires dans certains cas.
La durée de l'interdiction de réadmission est de 5 ans maximum si la personne est expulsée après l'expiration de la période de 'retour volontaire', voire davantage si la personne représente une menace 'sérieuse' pour la sécurité publique. Les Etats membres gardent cependant la possibilité de lever, annuler ou suspendre cette interdiction.
Si une personne est placée en rétention suite à une décision administrative, cette décision doit être validée par un juge 'dans les plus brefs délais' - la proposition initiale imposait le contrôle juridictionnel dans un délai de 72 heures, contre seulement 48 pour la Commission des Libertés civiles du Parlement.
Les enfants et les familles détenus 'en dernier recours'
Selon ce texte, les enfants et les familles ne doivent faire l'objet d'aucune mesure coercitive, et ne doivent être détenus qu'en dernier recours. Les mineurs non accompagnés
*On note actuellement une recrudescence de ce type d'immigrants en séjour irrégulier, notamment en provenance d'Asie
ne peuvent être expulsés que si leur famille, ou une structure d'accueil, les prennent en charge à leur arrivée.
Situations d'urgence
Un article inséré par le Conseil prévoit par ailleurs une plus grande flexibilité pour les autorités administratives en cas de 'situation d'urgence' : si 'un nombre exceptionnellement important' de ressortissants de pays tiers à expulser pose 'une charge lourde et imprévue' sur les capacités administratives et judiciaires d'un Etat membre, le contrôle juridictionnel peut être repoussé et les conditions de détentions moins favorables.
Les Etats membres doivent en outre tenir compte de la situation du pays d'origine, en vertu du principe de non-refoulement (qui stipule qu'aucun Etat ne refoulera de quelque manière que ce soit un réfugié vers un pays où sa vie ou sa liberté peut être menacée). Le Parlement européen décidera désormais quels pays peuvent être considérés comme 'sûrs' en codécision avec le Conseil, suite à un récent jugement de la Cour de justice.
L'aide juridique soumise aux conditions de la directive « procédure »
La directive prévoit une aide juridique gratuite aux immigrants illégaux sans ressources, en accord avec les législations nationales et la directive 'procédure' de 2005, qui encadre l'aide fournie aux demandeurs d'asile. Le fonds communautaire pour le retour, mis en place pour la période 2008-2013, pourrait également être utilisé pour financer l'assistance juridique.
Encourager le « retour volontaire »
La directive instaurera une approche en deux étapes : la décision de retour ouvre une période de 'retour volontaire', qui peut être suivie d'une 'décision d'éloignement', c'est à dire d'expulsion. Si celle-ci est prononcée par l'autorité judiciaire, et s'il est estimé que la personne visée risque de s'y soustraire, celle-ci peut être placée en centre fermé, par décision judiciaire ou administrative. La directive établit une durée maximale de rétention —, celle-ci est aujourd'hui illimitée dans certains Etats membres —, et définit des standards de conditions de vie à garantir, parmi lesquelles le droit à une assistance médicale et à l'éducation pour les enfants.
Le fonds européen pour le retour, mis en place pour la période 2008-2013 et doté de 676 millions d'euros, pourra être utilisé pour financer l'aide juridique aux immigrants illégaux. L'utilisation du fonds était suspendue à l'adoption de la directive 'retour'.
Si une personne est expulsée après expiration du délai du 'retour volontaire', elle peut se voir soumise à une 'interdiction de réadmission' pendant laquelle elle ne pourra pénétrer à nouveau sur le territoire de l'Union.
Des écarts importants d'un État à l'autre
Selon les États membres, on constate des écarts importants dans les durées maximales de rétention actuelles :
- 32 jours, France, Chypre
- 40 jours, Italie, Espagne
- 8 semaines, Irlande
- 60 jours, Portugal
- 3 mois, Luxembourg, Grèce
- 6 mois, Slovénie, Slovaquie, Rep. tchèque, Hongrie, Roumanie
- 8 mois, Belgique
- 10 mois, Autriche
- 12 mois, Pologne
- 18 mois, Allemagne, Malte
- 20 mois, Lettonie
- Durée illimitée : Danemark, Estonie, Finlande, Lituanie, Pays Bas, Royaume Uni, Suède.
La politique européenne commune d'immigration
La « directive retour » devrait constituer une première étape d'une politique d'immigration européenne. Les autres aspects de cette politique actuellement étudiés sont la promotion de l'immigration légale des travailleurs qualifiés, avec le projet de directive « Blue Card » ainsi que la sanction des employeurs d'immigrants illégaux afin de décourager le travail clandestin.
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