L'exposition Music Palace réunit 45 musiciens contemporains, occidentaux et orientaux, dans la Villa Empain à Bruxelles, avec pour thème lepouvoir de la musique.
Visiter la Villa Empain vaut certainement le déplacement jusqu'à Bruxelles tant l’histoire et la conservation de cette demeure bâtie en 1930 est unique. L’architecte suisse Michel Polak, figure de l’Art déco fut choisi pour réaliser une villa dont les proportions se situent au carrefour de l’art des années 1930 et du Bauhaus encore au stade expérimental. Le raffinement sublime des matériaux choisis (granit poli de Baveno sur les façades, cornières en laiton dorées à la feuille, bois de palu moiré des Indes, noyer et loupe de noyer, ferronneries, vitraux et verrières décorées, mosaïques, etc.) témoigne du luxe et de la modernité d’une architecture qui inspire encore aujourd’hui.
Orchestrée par la commissaire Diana Wiegersma, l’exposition Music Palace est une réussite. Son but : réunir 45 artistes contemporains autour du pouvoir de la musique. La musique, un thème souvent exploité, mais rarement de manière aussi originale, réunissant, selon la philosophie de la fondation Boghossian, des artistes occidentaux et orientaux.
Fédérer, envoûter, se libérer, se révolter, la musique est un medium à la fois politique, religieux, charismatique, cathartique, ou simplement ludique.
« Nous avons choisi des œuvres à la fois puissantes, dérangeantes parfois, mais aussi pleine de poésie et d’humour » explique avec enthousiasme la commissaire de l’exposition.
Dans le hall majestueux de la villa Empain se dresse le totem de la musique, par Gregor Hildebrandt, réalisé au moyen de disques vinyl thermoformés. Et juste à côté un immense cylindre envahit toute la pièce tapissée de bois précieux : les effets vibratoires sur l’être humain ont des vertus libératoires qui sont utilisées depuis la nuit des temps. L’espace consacré à la chanteuse Oum Kalthoum qui fut choisie par Nasser pour rassembler le peuple égyptien, et qui devint une véritable star nationale, ayant reçu des obsèques souveraines, témoigne du pouvoir magique de la musique. Mais au delà du son, il y a le mouvement, la danse, la sensualité, autant d’expressions du corps à la fois vénérées et honnies par de nombreux pays islamistes. « Dansez ! » nous enjoint Claude Lévèque. Plus loin, les grandes photos de Newsha Tavakolian montrent des femmes iraniennes frappées de l’interdit de chanter. Ces voix muselées dans les « Screampots » de Babak Golkar enferment un cri qui s’entend malgré le silence.
Rupture
« Nous avons aussi voulu rendre hommage au Rock and Roll, comme émancipation radicale de la jeunesse. » ajoute la commissaire.
Une sublime photo de Roberto Longo "Men in the Cities", fait référence à l’époque des yuppies, leur uniforme, leurs gestes, et l’effet de tribu qui comme dans la religion procure une sensation rassurante d’appartenance. Autre hommage, celui-ci à Edgard Degas qui fut en rupture avec l’art convenu du portrait au XIXème, des danseuses taille réelle réalisées par Folkert de Jong en frigolite et polystyrène font face à un gigantesque piano recouvert de peluches. C’est le piano personnel du musicien Charlemagne Palestine qui exprime quand à lui sa rupture avec la musique classique. « La musique est le suprême mystère des sciences de l’homme, celui contre lequel elles butent, et qui gardent la clé de leur progrès. » affirmaient Claude Levis-Strauss. Aujourd’hui son mystère est encore intact.
Les danseuses de Folkert de Jon
Par Aurore t’Kint
- Music Palace
- Jusqu’au 08/02/2015
- FONDATION BOGHOSSIAN – VILLA EMPAIN
- Centre d’art et de dialogue entre les cultures d’Orient et d’Occident
- Avenue Franklin Roosevelt 67
- 1050 Bruxelles, Belgique
Ouvert du mardi au dimanche de 10 à 18h30.
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