Charles Le Brun, le peintre du Roi-Soleil, au Louvre Lens

Du 18 mai au 29 août 2016, vous pourrez admirer les oeuvres de Charles Le Brun, le peintre du Roi Soleil, au Musée du Louvre Lens. Récit de notre experte, Caroline Benzaria.

Charles Le Brun au Louvre Lens

Quelles furent les clefs du succès de l’un des premiers peintres français à avoir fait fortune de son vivant ? Que penser de Charles Le Brun ? Cette exposition retrace l’histoire d’un artiste du XVIIième siècle hors du commun et lié au pouvoir. Charles Le Brun a su conquérir la confiance souveraine de Louis XIV.  Chef d'orchestre  très connu du faste (penser à la Galerie d’Apollon dans le Palais du Louvre et au Château de Versailles qu’il métamorphose en château du Roi Soleil), Charles Le Brun a connu une éclatante carrière mêlant art et communication. Ce parcours brillant est retracé en 235 oeuvres, dont certaines intimistes.

L’ascenseur social

Charles Le Brun est né le 24 février 1619. Son père, Nicolas Ier Le Brun, est un sculpteur sans dons particuliers. Julienne Le Bé, sa mère, est issue d’une famille de maîtres écrivains, une profession sous l’Ancien Régime qui touche à tous les arts de l’écrit, allant de l’écrivain public au calligraphe. Rien ne le prédestine à une telle ascension sociale, si ce n’est d’être un prodige.

Pour réussir il lui aura fallu du talent et un bon réseau !

Après sa formation durant les années 1630, auprès de peintres de renom tels François Perrier, Simon Vouet ou Poussin, il vole de ses propres ailes.

 Charles Le Brun, Portrait équestre du chancelier Séguier, huile sur toile, vers 1660, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre / Franck Raux)

Charles Le Brun va faire une rencontre capitale vers 1635, année où il croise le chemin du chancelier Séguier (1588-1672), qui est de 30 ans son aîné. Le chancelier devient son « patron » et protecteur. Le Brun est alors âgé de 16 ans. C’est grâce au Chancelier Séguier que le jeune artiste reçoit sa première commande, un tableau pour Richelieu, une œuvre classique: Hercule terrassant Diomède (vers 1640).  Charles Le Brun a 21 ans quand il réalise cette œuvre. En 1646, il obtient du Chancelier Séguier une place vacante de valet de chambre du roi.

 Charles Le Brun, Hercule terrassant Diomède, huile sur toile, 1640-1641, Nottingham, Castle Museum and Art Gallery © Nottingham Castle Museum & Art Gallery.

Revenons au portrait du chancelier Séguier qui est  devenu une icône de l’art français. Que dit l’auteur de son modèle ?  

Le Brun se souvient en 1660 de cette rencontre fondatrice. Il veut lui rendre hommage. Il choisit la forme du portrait officiel, dans la tradition des portraits d’apparat qui représentent les grands de ce monde à cheval. On aperçoit de loin le grand homme, en train de se déplacer, inaccessible, somme toute, hors d’atteinte. Le Brun lui marque son respect et fait entendre la hauteur du modèle en inventant une scène  presque pré-cinématographique. Fixé en contre plongée, c’est-à-dire, vu du dessous, le modèle paraît quelque peu hautain. Qui regarde-t-il ? Il se  joue, dans ce portrait collectif du chancelier Séguier,  la dramaturgie de la peinture du XVIIe siècle français corrigée par la règle qui calme l'agitation et le bruit.

Une grande attention est portée au vêtement, aux décorum,  qui informent sur le rôle, la fonction, la richesse, le rang social et la mode. Les protagonistes de la scène, l'entourent: 8 pages. Souvenir de sa jeunesse : ils forment une ronde autour du cheval. Une tête de cheval singulière qui n'est pas sans évoquer ses études futures, quand il observe la manière dont les passions changent l’expression du visage. Pour lui, la physionomie d’un visage révèle un tempérament. Et, il compare des physionomies humaines et animales.

Charles Le Brun, Trois têtes d’homme en relation avec le lion, pierre noire, plume et encre noire, lavis gris et gouache blanche, vers 1668- 1678, Paris, musée du Louvre © RMN-Grand Palais (musée du Louvre / Mathieu Rabeau)

Le Brun a médité le traité des Passions de l’âme de Descartes (1649 ) pour développer sa théorie.  A l’époque : « On pensait en effet que la similitude des traits correspondait à une similitude des caractères : ainsi l’homme-lion est courageux et magnanime, l’homme- cochon, lubrique et paresseux... ».

Seconde importante rencontre dans son ascension professionnelle, celle de Nicolas Fouquet ami des arts.

De 1657 à 1661, Le Brun dirige la décoration des appartements de réception du château de Vaux-le-Vicomte pour le surintendant des finances qui sera destitué sur ordre de Louis XIV en 1661 pour malversations. Ayant visité ce château époustouflant de nouveautés et de brillance, Louis XIV réalisa, combien Versailles en était dépourvu . Louis XIV décida d’enchérir.

Ultime rencontre : Louis XIV.

Le roi commença par anoblir Le Brun et à l’associer à sa propre gloire en lui donnant pour armes le soleil et une fleur de lys. Il le désigna en 1962 premier peintre. Les charges et commandes s’enchaînent. Nommé directeur de la Manufacture royale des Gobelins, Le Brun se charge des grands chantiers de décoration du règne de Louis XIV (galerie d’Apollon au palais du Louvre, appartements des Tuileries, ornement des châteaux de Saint-Germain-en-Laye, de Marly et de Versailles), des lieux pérennes qui se visitent aujourd’hui.

Manufacture des Gobelins, Atelier de Jean De La Croix, Terpsichore, tapisserie de basse lisse, laine, soie et or, Paris, Mobilier national © Philippe Sébert.

Le Brun à Versailles

À partir de 1671, Le Brun à Versailles supervise la décoration de l’appartement des Bains (1671-1681) et des grands appartements du roi et de la reine (1671-1680 ). Il conçoit et prend pleinement part à la réalisation de l’escalier des Ambassadeurs (1674-1679) et de la galerie des Glaces (1678-1684) , ainsi que de ses deux salons adjacents, le salon de la Paix et le salon de la Guerre (achevés en 1686). 

Les dernières années

À la mort de Colbert en 1683, Le Brun est évincé par le marquis de Louvois quoique nommé directeur de l’Académie royale de peinture et de sculpture. Des livres lui sont dédiés et des biographies font l’éloge de son art.

A la fin de sa vie, il peint de petits tableaux de chevalet destinés exclusivement à Louis XIV.

Charles Le Brun, L’Adoration des bergers, huile sur toile, 1689, Paris, musée du Louvre © RMN-GP (musée du Louvre / Franck Raux.

 « [...] par une sorte de paradoxe l’œuvre du Premier Peintre de Louis XIV se conclut ainsi sur l’accent le plus dépouillé et le plus tendre. » Jacques Thuillier, à propos de ce tableau, écrit en 1968.

Gardien de l'art

Charles Le Brun, Ange portant l’arche d’alliance, carton, pierre noire et rehauts de craie blanche, H. 195 cm, L. 193,5 cm, vers 1674, Paris, musée du Louvre © Musée du Louvre / Marc Jeanneteau.

Le Brun veillera personnellement à la diffusion de son œuvre par la gravure, tout comme l’avaient fait avant lui Raphaël (1483-1520 et Rubens (1577-1640 . Grâce à un Privilège obtenu en 1656, la plupart de ses grands tableaux et décors peints sont reproduits et assurent sa postérité jusqu’à la fin du siècle des Lumières.

Il quitte ce monde non sans avoir en 1648 participé à la fondation de l’Académie royale de peinture et de sculpture et en 1666 à celle de la fondation de l’Académie de France à Rome.

A savoir : Une occasion d’aller revisiter le Château de Versailles  qui a invité cette année l’artiste contemporain Olafur Eliasson (7 juin-30 octobre 2016). Site: chateauversailles.fr

Informations pratiques 
Du 18 mai - 29 août 2016 Musée du Louvre-Lens, 99 rue Paul Bert 62300 Lens. Tel : +33 03 21 18 62 62.  Site: louvrelens.fr

Caroline Benzaria

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