Etole bleue assortie à ses yeux, Isabelle Nanty reçoit TPLF dans un café près de la Motte-Piquet sans chichis. La blonde comédienne n’aime pas trop savoir à l’avance ce qui l’attend. Elle aime être surprise et un programme précis l’angoisse.
Mais cette année l’année commence fort. Le chanteur Bénabar lui a demandé de mettre en scène sa pièce (coécrite avec Hector Cabello-Reyes) « Je vous écoute » qui a débuté le 22 janvier. Depuis le 3 février, elle est à l’affiche de Les Tuche 2-Le Rêve Américain dans le rôle de Cathy et elle participe aussi à la prochaine diffusion de la série Fais pas ci, fais pas ça. Entretien agréable et pétillant autour d’une menthe à l’eau.
Dans ses choix professionnels, Isabelle Nanty se laisse guider par ses rencontres. « Je n’ai pas de plan, je me laisse un peu porter par les propositions ». En mère attentive, la comédienne refuse de jouer au théâtre pour pouvoir rester avec sa fille le soir. « J’aménage au maximum mon emploi du temps pour être la plus présente possible, sinon ce n’est pas la peine d’avoir des enfants. » Elle revient tout de même au théâtre en dirigeant pour la seconde fois Bénabar. « En majorité, je mets en scène des pièces contemporaines et la sienne était super bien écrite. Et puis l’équipe est vraiment tendre, pas de conflit, pas d’ego.» Mais pour elle ce qui compte, ce sont les gens avec qui elle travaille et n’imagine pas une seconde côtoyer des personnes qu’elle n’aimerait pas.
« Quand il n’y a pas d’amour quelque part, je pense que je vais crever. »
La mise en scène : une histoire de temps
Chaque metteur en scène a sa façon d’aborder son travail. Isabelle le voit comme une recette de cuisine.
« Comme pour une petite fête, on a concocté un truc comme un bon repas, dosé les ingrédients et on espère que le public aura autant de plaisir à y participer qu’on a mis de temps à la préparer. On espère que ce qu’on a aimé, pour lequel on a eu un coup de cœur, va toucher et va plaire. Evidemment c’est décevant si ça ne plait pas. »
Avant de présenter le travail de toute une équipe, il revient au metteur en scène de diriger les comédiens. Et là la délicatesse s’impose.
« J’essaye d’être au plus près de ce que j’ai lu la première fois, de ce que l’auteur a voulu dire ou exprimé. Après il faut laisser la liberté à chacun en les amenant doucement à ce qu’on préfère chez eux. Mais il ne faut pas leur dire. Il faut les amener à ce qu’on veut, à ce qu’ils soient dans une évidence. C’est un travail lent qui demande du temps et il faut respecter le temps de chacun comme un plat où le temps de cuisson est différent pour chaque ingrédient et il faut pourtant que tout se retrouve dans les assiettes en même temps et que cela forme un tout. Il faut respecter le temps de chacun et le temps que doit mettre une pièce à se poser. »
Même si Isabelle sait à l’avance ce que cela va donner au final, il faut attendre. « Il faudrait dire poser en scène plus que mettre en scène. Il faut poser et laisser reposer, plus laisser une pause et proposer. C’est une histoire de temps et c’est ça ce qui est fatigant ». En bref mettre en scène nécessite de la patience. Ce qui n’est pas du tout dans la nature d’Isabelle.
Action et intuition
« Je suis hyper impatiente. Ma nature est un peu hyper active et je fais partie des gens qui ont des troubles de l’attention et de la concentration. » Isabelle a du composer avec cette particularité en abordant son travail autrement.
« Je suis parfois plus physique et intuitive que réfléchie. Je n’ai pas beaucoup de réflexion dans mon travail. Je suis dans l’action et le mettre en action. »
Cela ne l’empêche pas d’écouter les autres « c’est souvent plus intéressant que ce que j’ai à dire. Mais je trouve que les gens ne parlent pas assez vite. Au 5e mot, j’ai compris la phrase. Catherine Jacob, que j’adore, ne finit pas ses phrases. Elle parle par ellipse, par allusion et ça me va très bien. C’est la cadence qu’il me faut. » Elle aime aussi les émissions culturelles, de philosophie, politique. « Je n’en retiens rien car je ne peux pas en faire une synthèse. Mais ce que j’ai ressenti s’exprime après intuitivement dans mon travail. »
Connue et appréciée pour incarner des personnages souvent extravagants, l’actrice ne considère pas ses rôles comme comiques, bien au contraire. « En fait tous les rôles que je joue sont dramatiques ils sont dans des comédies mais ne sont pas des personnes drôles. Je les jouerais pareil dans un film dramatique. »
Après un premier film « Le bison », la réalisatrice n’a pas réussi à monter un second long-métrage malgré 5 scénarios écrits. « J’ai renoncé. J’avais mis de moi dans les scripts. Quand ils sont refusés, cela vous abime. Je n’ai plus envie de passer du temps à cela. J’ai des choses à dire mais je ne les dirai plus comme ça. » Des éditeurs lui ont proposé d’écrire ses mémoires, sans succès. « J’ai refusé. Quand vous racontez votre vie vous impliquez des gens qui n’aimeraient peut-être pas que vous en parliez. Et puis il faudrait repartir en arrière et ça ne m’intéresse pas du tout ! »
Par Véronique GUICHARD
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