Julie d'Europe 1 : la voix d'une radio

Pour certains, l'animatrice Julie a comme nom de famille, d'Europe 1. Julie n'a pas un visage célèbre mais elle possède une voix reconnue, associée depuis 40 ans à l'image d'Europe 1. Rencontre en studio entre deux pubs.

Dans le studio Coluche, Julie, derrière son micro, entourée d'écrans d'ordinateur et de télévisions, assure la permanence. Pendant une émission enregistrée, elle lance les flashs d'information, dit les publicités et désannonce les chansons. 'Europe 1, c'est mon métier et ma vie.'

L'animatrice vient de quitter à 9h30, le studio de la matinale, où elle a donné la réplique à l'humoriste vedette de la station, Nicolas Canteloup. 'C'est le grand moment de la journée. C'est un régal que de participer à cela. En plus il est adorable. Les dialogues me sont donnés au dernier moment, je ne lis que ma partie pour garder la surprise des chutes.C'est mon côté comédienne qui revient.'

 

Une vie extra-ordinaire

Etudiante à Lyon en licence d'histoire de l'art, la jeune Julie habite chez ses parents à Saint Etienne. Elle rêve de Paris et déjà d'Europe 1, la radio de son adolescence. ' Je voulais sortir d'une vie normale.' Elle croise dans les bistros les comédiens de la Comédie de Saint Etienne, importante à l'époque et des amateurs qui l'engage.
Licence décrochée, études terminées, elle monte à Paris. 'Je voulais faire quelque chose d'artistique, de marginal. ' L'ordinaire de sa vie ne sera pas banal, elle se le promet.

Un coup du destin

C'est l'époque du Café de la Gare, elle croise un acteur de Saint Etienne, Alain Scoff qui monte un spectacle, puis Jean-Michel Ribes. Elle joue les fofolles dans des sketchs délirants et absurdes. Payée trois fois rien mais libre. Elle se présente à une audition à Europe, elle est recalée. ' Malgré les qualités évidentes de votre voix, vous ne correspondez pas au style que nous recherchons actuellement. Je me souviens encore par coeur.'
Mais le destin tient à sa voix: Un réalisateur de la radio convoque la troupe pour un sujet sur les cafés-théâtres. Michel Brillié, la branche sur des essais...qui ne donnent rien. mais un an et demi après, on l'appelle pour former un duo avec Xavier Gélin. Le 8 mai 1972, elle débute sur l'antenne: 'un rêve.'

Un rêve

De quelques centaines de spectateurs, elle s'adresse maintenant à des milliers. 'Parler à l'inconnu, c'est un rêve.' le métier convient bien à cette timide. 'J'aime ce côté caché. Je ne suis pas à l'aise de prendre la parole en public, encore maintenant. On pourrait même faire de la radio dans le noir.'
Elle se sent tout de suite libre. Une consigne lui est donnée: parler quand tu le sens. Un conseil l'accompagne, celui de Daniel Filipacchi, magnat de la presse: En radio, il faut savoir se taire.
'Attentive, à l'écoute de mon partenaire, je dois être dans la pertinence, ajouter un détail, un commentaire, une réaction, une correction.'
Sa nature de comédienne lui permet de donner la réplique aux humoristes qui se succèdent à Europe. Elle est la spectatrice numéro 1 de Jean Roucas, Lafesse, Boujenah, Thierry Le Luron, Laurent Gerra, Ruquier ou Laurent Baffie. 'Cela me plaisait beaucoup.'

canteloup et Julie

 

Une chance

'J'ai une chance terrible. Je participe au prime time en radio: la matinale et je vois l'homme ou la femme du jour. ' Défile dans la studio de la rédaction, tous les invités politiques nationaux ou internationaux de Jean-Pierre Elkabach et toutes les personnalités qui font l'actu médiatique, artistique du jour. 'C'est très vivant, toujours différent et varié. C'est l'actualité qui fait cela.' Elle se souviendra toujours de l'immense silhouette de George Bush père traversant la rédaction en lançant aux journalistes affairés, un décontracté: 'hello guys!'
Pour Julie, mère de trois enfants, son métier n'est pas un travail, dans le sens obligation ou contrainte, 'c'est ma vie. ' 'Pour moi le travail est à la maison où je dois gérer beaucoup de choses et m'occuper de tout.''Ma vie privée aussi est passée par la radio.' L'animatrice comme d'autres de ses consoeurs a connu son mari, Gérard Leclerc, à Europe 1. Il est désormais directeur de la chaine LCP.

Julie ne ressent pas de stress derrière son micro. 'A l'antenne, je n'ai pas de responsabilité particulière, je n'ai jamais eu l'ambition d'avoir une émission à moi. j'ai toujours envisagé la durée. il vaut mieux pour cela être en retrait.'

Toujours attachée à “la maison”

Aujourd'hui, les temps ont changé depuis l'époque où elle traversait, intimidée, la rédaction en ébullition, peuplée d'hommes qui s'interpellaient. Maintenant chacun est penché sur son ordinateur. Fini aussi le vedettariat des animateurs. Depuis 15 ans, les journalistes ont pris possession de l'antenne.
Si elle apprécie sa chance, elle n'a pas connu que des duos sympathiques. 'Les hommes ont des egos plus développés que les femmes. Certains avaient des difficultés à partager l'antenne et se faisaient même méprisant à mon égard.'
Désormais, les caméras, un comble pour la radio, sont partout, pour retransmettre sur internet ce qui se passe dans les studios mais aussi dans les bureaux de la direction. 'La magie disparaît.'

Elle est tellement attachée à ' la maison' qu'elle aimerait y être encore plus associée en terme d'image et de communication. Une vraie reconnaissance visible par tous, serait, pour celle qui est la voix incontestée de la station: avoir son portrait entre Canteloup et Drucker.
Voilà qui serait la moindre des choses.

Par Veronique Guichard

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