Une ballerine sauvée des rebelles

Michaela Deprince fait partie des danseuses candidates, dans le film Le concours de danse » actuellement sur les écrans et réalisé par Bess Kargman. L'histoire de sa vie dépasse, elle, la fiction. Née en Sierra Leone pendant la guerre civile, Michaela Deprince a connu le cauchemar absolu pendant ses toutes premières années, avant que sa chance lui soit donnée par un couple d'Américains qui l'ont adoptée et lui ont ouvert la voie de la danse. Un miracle digne d'un conte de Noël.

Qu'espérer de la vie lorsque l'on nait en Sierra Leone pendant la guerre civile, que l'on voit les membres de sa famille assassinés un à un par les rebelles, et que l'on se retrouve à l'âge de 3 ans dans un orphelinat miteux, méprisée même par les tutrices qui qualifient une petite fille « d'enfant du diable » parce qu'elle est atteinte d'un vitiligo, maladie qui dépigmente la peau ?

Michaela Deprince


A priori rien. Et pourtant, la simple photo d'une ballerine sur une couverture de magazine deviendra le talisman de cette enfant pour qui la vie a si mal commencé. Symbole de beauté, de bonheur et de liberté, la ballerine photographiée sera le rêve auquel s'accrochera désespérément Michaela, jusqu'à le réaliser. Comme si la force de son espérance avait résonné jusqu'à chez ce couple d'américains venus adopter deux fillettes sierra-leonaises quelques années plus tard.

Avant de s'émerveiller d'entendre une si belle histoire, on ne peut pas ne pas évoquer les atrocités vécues par la petite fille : sa mère morte de faim, son père et ses frères tués, et la seule enseignante qui ne l'a pas rejetée, sauvagement mutilée et assassinée parce qu'elle était enceinte d'une fille et non d'un garçon. Un malheur n'arrivant jamais seul, Michaela souffre d'une dépigmentation de la peau visible au niveau de son cou et de son buste, et devient le « n°27 », dernière enfant maudite d'une liste noire édifiée par des « nurses » lui répétant à longueur de temps que personne ne voudra jamais adopter une enfant comme elle.

C'est une autre petite fille, « le n°26 », exclue elle aussi parce qu'elle est gauchère, qui viendra partager ce calvaire avec elle, jusqu'à ce qu'un miracle se produise le jour où Elaine et Charles Deprince adoptent les deux fillettes pour leur offrir une nouvelle vie aux Etats-Unis à Philadelphie. Michaela a alors 4 ans.
Très vite, Michaela manifeste son engouement pour la danse classique et parvient en regardant des vidéos à déterminer les erreurs techniques des danseurs qu'elle visionne des centaines de fois, alors qu'elle n'a jamais pris un cours de danse de sa vie.

Michaela Deprince


A l'aube de ses 5 ans, ses parents adoptifs l'inscrivent donc à la « Rock School for Dance Education » à Philadelphie. Michaela travaille dur et fait preuve d'une volonté sans faille. Mais obsédée par les taches blanches sur sa peau noire, elle préfère éviter les miroirs et tremble à l'idée que sa maladie soit un handicap pour une danseuse, ce à quoi son professeur la rassure et lui avoue n'être focalisée que sur ses qualités techniques et son travail. C'est une révélation pour Michaela qui franchit un nouveau cap et s'investit encore plus dans ce qui lui tient le plus à cœ,ur : danser et devenir une ballerine.

Parmi les six personnages principaux du film « Le concours de danse » actuellement sur les écrans et réalisé par Bess Kargman, Michaela - qui a 14 ans dans le film - lève le voile sur la vie d'une danseuse, ses sacrifices, son endurance infatigable, ses blessures, ses espoirs, sa philosophie et également son combat pour être acceptée comme soliste dans un ballet où toutes les ballerines sont blanches.

« L'Amérique n'est pas encore prête pour une Marie noire » lui dit-on alors qu'elle est sélectionnée comme soliste dans Casse-Noisette . Les vieux stéréotypes du monde de la danse classique lui feront hélas perdre le rôle. Son nouvel obstacle est donc le racisme.

Michaela rêve de changer les choses et d'inspirer d'autres jeunes gens comme elle. A force de convictions et d'un travail acharné, elle connaît pourtant actuellement un véritable succès et débute récemment sa carrière professionnelle en dansant comme soliste dans Le Corsaire, invitée par le Mzansi ballet en Afrique du Sud. Elle espère également revenir en Sierra Leone afin de fonder une école de danse pour les jeunes. Mais avant cela, elle souhaite profiter de sa jeune carrière et danser de grands rôles comme soliste. On lui souhaite tout le succès qu'elle mérite et de briller comme une étoile sur les plus grandes scènes du monde.

Laure Thirion

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