Mémorial de l’abolition de l’esclavage, à Nantes

Le Mémorial de l'abolition de l'esclavage ouvre ses portes à Nantes. Le monument, hommage aux millions de victimes de la traite et de l'esclavage à travers le monde, dépasse évidemment le cadre de l'histoire locale, même si la ville fut l'un des plus importants ports négriers d'Europe. Il se veut aussi appel à la conscience de chacun quant au monde qui l'entoure et au statut qui, selon l'ONU, perdure aujourd'hui pour des millions d'esclaves modernes.

2000 plaques de verres incrustées dans une esplanade végétalisée portant, chacune, le nom des navires négriers partis de Nantes, ainsi que les comptoirs, les ports d'escale et les ports de vente en Afrique, aux Antilles, aux Amériques et dans l'Océan Indien.



C'est ainsi que, peu à peu, au rythme de ses pas, le visiteur prend conscience de l'ampleur de cette tragédie. Nous sommes au Mémorial de l'abolition de l'esclavage, inauguré fin mars 2012 pour « se souvenir » et s'inscrire dans « un combat pour les Droits de l'Homme ». Un geste qui permet d'affronter —, tardivement - le passé sulfureux de cette ville qui a prospéré, de la fin du 17e siècle jusqu'en 1848 grâce à la traite négrière et le commerce triangulaire : navires partant avec des cales bourrées d'armes, d'alcool et de textiles en direction de l'Afrique, pour les échanger contre des esclaves, avant de partir les « livrer » dans les Caraïbes et en Amérique. Et « bouclant la boucle », ces mêmes navires revenaient les cales pleines de sucre, de café et de coton.

Plus de 450 000 africains furent victimes de ces expéditions nantaises et toute l'Europe trempa dans ce « troc » terrifiant. L'Eglise et les philosophes en tête ! Françoise Vergès, présidente du Comité national pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage analyse : « Les bénéfices économiques réalisés, le sentiment de supériorité ont fabriqué du consentement. » Et elle raconte que « le dictionnaire de langue française, au début du 18e siècle donnait pour synonymes les mots Noirs, Nègres et Esclaves »...


Ce Mémorial a été conçu par Krzysztof Wodiczko et Julian Bonder dans une double perspective : d'un côté, tourné vers une ville ancrée au bord de l'estuaire de la Loire, de l'autre, lié à la mer, qui fut porteuse du sinistre commerce transatlantique et engendra la prospérité de la ville. Les marées, sensibles jusque dans l'estuaire, apportent un élément dynamique supplémentaire à la conception de ce Monument bâti en plein centre-ville.

Ce monument est l'un des plus importants au monde consacrés à la traite négrière, à l'esclavage et à son abolition, et marque de manière solennelle le rapport de Nantes à son passé de premier port négrier de France au 18e siècle.

Empruntant un vaste escalier à ciel ouvert le visiteur descend dans un passage souterrain où il est plongé dans une ambiance qui évoque les cales d'un navire, avec une sélection de textes d'écrivains et de politiques qui rappellent les luttes des esclaves sur tous les continents pour leur libération : Aimé Césaire, Toni Morrison, Martin Luther King ou Olympe de Gouges...



Mais si le Mémorial veut rendre hommage à ceux qui se sont battus, il entend le faire aussi à l'adresse de ceux qui luttent, encore aujourd'hui, contre l'asservissement dans le monde actuel, en se voulant porteur d'un message universel de solidarité et de fraternité pour les générations futures. M. Ban Ki-Moon, Secrétaire Général de l'ONU déclarait récemment : « L'esclavage est un crime abominable. Ce type d'exploitation est en train d'évoluer et de refaire surface sous des formes modernes ». Et d'évoquer les 200 millions de personnes victimes d'asservissement pour dettes, de mariages forcés, de prostitution et de travail forcé, dont un nombre considérable d'enfants.




Visiter le Mémorial.
- Le Mémorial est d'accès gratuit. Ouvert toute
l'année (il ne ferme que la nuit et en périodes de
crue de la Loire).
- de 9h à 18h du 16 septembre au 14 mai,
- de 9h à 20h du 15 mai au 15 septembre.

Renseignements pratiques au 0811 46 46 44

Un parcours urbain sur la traite négrière.
- Un conseil : suivre le
parcours qui va du musée d'Histoire (et ses clés pour comprendre)
jusqu'au Mémorial (pour se souvenir).
- 11 panneaux informatifs relient symboliquement ces deux lieux
(compter environ 1 heure à pied).
- Plan du parcours disponible à l'Office du Tourisme.


Du milieu du 17e siècle au milieu du 19e siècle, la France
a organisé plus de 4220 expéditions négrières,
soit plus
de 1 380 000 personnes déportées. 18 villes françaises ont
pratiqué la traite : Nantes, Le Havre, La Rochelle, Bordeaux,
Saint-Malo, Lorient, Honfleur, Marseille et Dunkerque et,
dans une moindre mesure, Rochefort, Bayonne, Vannes, Brest, Morlaix, Dieppe, Cherbourg, Saint-Brieuc, Sète...

Art. 4 - Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (1948)
- « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude , l'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes. »



Par Julie Montagard

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