Le premier peintre du monde
L'exposition d'Andrea Mantegna au Louvre est l'événement phare de la rentrée.
Peintre majeur du quattrocento italien, il est reconnu de son vivant comme « le premier peintre du monde ». Andrea Mantegna s'est nourri de ce que ce siècle de culture lui apportait d'inestimable : la découverte de la perspective , l'importance du détail chez les maîtres flamands , la force du volume chez le grand sculpteur Donatello. Il en a fait une œ,uvre personnelle saisissante de présence, qui a considérablement influencé ses contemporains.
Le Louvre a rassemblé, à coté des œ,uvres de Mantegna, un choix important d'oeuvres d'autres artistes, qui met bien en lumière le rôle de celui-ci dans son siècle.
«C'est d'abord une histoire, que nous avons voulu vous raconter», dit Dominique Thiébaut, commissaire de l'exposition , celle d'un homme, Andrea Mantegna, peintre exceptionnel, qui a vécu dans une période exceptionnelle pour les arts, le quattrocento italien.
-On a du mal à réaliser aujourd'hui l'effervescence artistique qui régnait dans les grandes cités italiennes de cette époque. Les maîtres de ces cités étaient de grands amateurs d'art , ils rivalisaient entre eux pour stimuler la création, subventionner des artistes, découvrir et s'attacher les plus grands, et posséder les plus belles œ,uvres d'art.
L'exposition a été conçue pour illustrer tout le parcours de Mantegna, et le replacer dans son siècle , la richesse et la diversité des possessions du Louvre permettaient cette ambition , des prêts exceptionnels l'ont complétée , prés de 190 pièces ont pu être rassemblées.
- Dans l'atelier, se croisaient tous les plus grands artistes, peintres, sculpteurs, philosophes, écrivains, érudits... Tous ces contacts influençaient les jeunes apprentis , s'est créée de cette façon une véritable « marque de fabrique » propre à l'atelier de Squarcione, que Mantegna va développer à sa façon : notamment l'utilisation de la perspective, l'ajout de fruits, de guirlandes dans les tableaux, la signature dans une pierre, l'écriture à l'antique...et en particulier, la plastique et le relief, marque du sculpteur Donatello, dont l'influence se fera sentir sur toute l'œ,uvre de Mantegna (exemple Sainte Euphémie)
-L'exposition montre à merveille cette richesse avec, à coté des œ,uvres de Mantegna, celles de ses contemporains dans l'atelier.
Puis à 17 ans, Mantegna quitte Squarcione. Il reste à Padoue, en tant qu'indépendant, épouse la sœ,ur du grand peintre Vénitien Giovanni Bellini.
-C'est le début d'une période où l'influence réciproque de ces deux grands artistes va être importante et marquer leurs productions, jusqu'à créer parfois des doutes quant à l'attribution de certains tableaux , c'est aussi l'affirmation de la facture personnelle de Mantegna : son intérêt pour le détail, marque des maîtres flamands qu'il admire comme Van Eyck et Van Der Weiden , sa recherche des couleurs, des nuances, de la poésie, l'importance de la nature...il peint des champignons sur le sol, plante des ruches un peu partout, met toujours quelques lapins comme une signature détournée.
-Le retable de San Zeno de Vérone est l'une des œ,uvres marquantes de cette période , les trois parties de la prédelle du triptyque ont pu être rassemblées et sont montrées dans l'exposition.
En 1460, la vie de Mantegna bascule : il quitte Padoue et l'indépendance, et accepte l'honneur de devenir le peintre attitré de la cour du marquis de Gonzague, à Mantoue. Il restera jusqu'à sa mort le peintre officiel de cette dynastie, voyant défiler trois générations.
-Le dialogue avec la communauté si riche des artistes de Venise et de Padoue s'interrompt. Mantegna est isolé, et va devenir le grand peintre, incontesté, mais solitaire, qui sera sa caractéristique.
-Il est connu, les commandes sont là, il peint toujours avec cette veine humaniste qui est la sienne : comme cet enfant qui suce son pouce dans la circoncision ...il peint toujours avec cette présence saisissante du relief, avec cet amour de la sculpture qui lui fait réaliser des tableaux que l'on croirait en trois dimensions comme dans Judith et sa servante , petit tableau cadeau à Laurent Le Magnifique...ou Didon.
-C'est à ce moment qu'il commence la gravure : elle lui permet d'exprimer ses recherches personnelles sur le dessin, en dehors des commandes officielles, toujours très contrôlées par la famille Gonzague. Il travaille avec des maîtres graveurs. Ses gravures, largement diffusées, vont servir de modèle à toute une série d'artistes, et faire beaucoup pour la notoriété de la « façon » Mantegna.
-De très belles gravures sont montrées dans l'exposition, comme le combat des dieux marins , la mise au tombeau , on peut comparer avec les réalisations d'autres artistes, inspirés par ces gravures et qui les ont traduites traduisant en utilisant des matériaux les plus divers : dessin a la plume, sculpture en bronze...
En 1491, Mantegna a 60 ans. La jeune épouse du Marquis de Mantoue François II alors au pouvoir est Isabelle d'Este, elle a 17 ans. Elle commande à Mantegna des tableaux pour orner son « studiolo », cabinet personnel alors très à la mode.
-Ces travaux de décoration vont durer des années...Aux peintures un peu sévères de Mantegna, philosophiques et politiques, sont associés plus tard d'autres artistes plus lyriques et au goût de l'époque, comme Corrège, Le Pérugin, et Amando Costa.
-Le Louvre présente le deuxième aménagement du studiolo, dont les deux tableaux de Mantegna...Fascinant de comparer son allégorie du Vice et de la Vertu avec celle de Corrège sur le même thème, où apparaît toute la légèreté de la Renaissance italienne.
La dernière partie de l'exposition montre l'une des œ,uvres majeures de Mantegna, qui l'occupera jusqu'à la fin de sa vie, les Triomphes de César. Cycle composé de neuf grandes toiles, aujourd'hui propriété de la couronne d'Angleterre , l'une des toile présentée ici, est un prêt exceptionnel de la reine. Elle est accompagnée de toute une série de xylographies, dessin et peintures de Mantegna et d'autres artistes.
-Ce qui est troublant ici, est de voir la persistance des thèmes, projets, manières de Mantegna, son obsession toujours permanente des thèmes de l'antiquité, dans une époque où apparaît tout autre chose : le glorieux Cinquecitto italien, avec les approches picturales tellement différentes de Raphaël, Léonard de Vinci, Michel-Ange...
La Sainte Famille avec la famille de St Jean-Baptiste ' est l'une des dernières peintures de Mantegna, destinée a son propre tombeau.
-Quel humanisme pour peindre l'autre famille...
« Indépendamment de leur valeur et de leurs retombées scientifiques, il existe des expositions en prose et des expositions de poésie. La nôtre aspire à se ranger dans la seconde catégorie. » dit Giovanni Agosti, commissaire de l'exposition. Pari tenu.
Du 26 septembre au 5 janvier 2009
- Musée du Louvre
- Quai du Louvre,
- 75001, Paris
- www.louvre.fr
Lire:
-Vie des peintres-1-par Giorgio Vasari-ed Les Belles Lettres, 2002
-Recit de Mantegna-parGiovanni Agosti-coed Hazan/Musée du Louvre ed, 2008
- Musée du Louvre
- Quai du Louvre,
- 75001, Paris
- www.louvre.fr
Lire:
-Vie des peintres-1-par Giorgio Vasari-ed Les Belles Lettres, 2002
-Recit de Mantegna-parGiovanni Agosti-coed Hazan/Musée du Louvre ed, 2008
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