Vanitas, vanitatum, vanités contemporaines...
Du mercredi 14 septembre au dimanche 23 octobre 2011, la 9e édition de la Biennale d'Issy au Musée Français de la Carte à Jouer réunit les oeuvres de 46 artistes contemporains autour du thème de la Vanité. Une réflexion sur la mort, mais avant tout sur la vie, sa brièveté comme sa beauté, pour une célébration parfois grave, mais aussi teintée d'humour et de poésie, de notre passage sur cette Terre.

“Je ne suis pas loin, juste de l'autre côté du chemin” Charles Péguy
Vanitas, vanitatum,
vanités contemporaines...
Installée depuis 2003 au Musée Français de la Carte à Jouer, la Biennale d'Issy est une manifestation d'art actuel réunissant tous les deux ans une quarantaine d'artistes autour d'une thématique. Cette 9e édition réunit les oeuvres de 46 artistes. Mais la Biennale d'Issy donne aussi l'occasion de découvrir de jeunes plasticiens moins connus du grand public qui, tous, investissent le musée autour d'un même thème : la Vanité.

La Vanité encore et toujours, le miroir de nos vies...
par Stéphanie Bernardin, historienne de l'art.
Au XVIIe siècle, la Vanité porte en elle la certitude de la résurrection. Sans renoncer au Beau, elle transforme la mort, la décrépitude terrestre, en une promesse. Moins apaisées que leurs homologues historiques, les Vanités d'aujourd'hui sont le miroir d'une époque qui n'a pas pris le temps de construire sa philosophie de la mort.

Les origines de l'art occidental sont l'Antiquité et le Christianisme, dont les cultures, intimement mêlées dès la Renaissance, abordent les questions existentielles. Le Memento mori, dans les mosaïques de Pompéi, rappelle l'égalité des riches et des pauvres face à la mort, incarnée par le crâne.
L'attitude stoïcienne recommande alors de se soustraire au mirage de la puissance et de la richesse. Au Moyen-Age, ce sont des danses macabres qui encouragent les vivants à une prudente modestie face à la mort hilare. Ces deux créations, la première philosophique, la seconde religieuse, s'allient dans les Vanités du XVIIe siècle. Le crâne, avec ses orbites creusées et sa mâchoire béante, devient alors incontournable mais est rarement isolé.
Le savoir —, les livres, le compas —,, les plaisirs —, les instruments de musique, la sculpture —,, et la recherche de puissance —, les pièces de monnaie, l'orfèvrerie —,, ne résistent jamais au temps —, le sablier, la montre —, et à la mort —, le crâne —, qui, seule, autorise la résurrection —, la couronne de laurier —,. Dans la culture nordique calviniste, la Vanité devient synonyme de nature morte tandis que l'Italie préfère la figure humaine. La Contre-réforme favorise saint Jérôme, l'intellectuel qui délaisse ses livres pour se concentrer sur un crâne, ou Marie-Madeleine quittant ses atours de courtisane.
Cependant, dans ces tableaux, la femme reste belle, voire sensuelle, l'orfèvrerie resplendit et la tulipe s'épanouit dans le vase... Bref, la beauté n'est pas en reste car, si le crâne rappelle le caractère futile de l'enveloppe charnelle et des sensations terrestres, l'œ,uvre, elle, permet d'en profiter... encore un peu.
Religion et philosophie antique sont sabrées dès le XIXe siècle, grand inventeur du positivisme scientifique. Libre de ses moyens d'expression et de son vocabulaire, l'artiste plasticien véhicule aujourd'hui sa propre notion de la Vanité. Evoquant la sensation de vide - Joël Brisse - ou l'absurde d'une société qui ne veut pas vieillir - Didier Van Sprenge -, l'artiste dépasse largement les thèmes anciens pour ouvrir sur la société et l'histoire.

A t-il pour autant abandonné cette sensualité de l'objet ou ce goût de la matière que les artistes du XVIIe siècle affectionnent —, Anne Chériez ? A t-il résolu cette énigme du passage vers la mort ? Le crâne prolifère —, Cynthia Chazal —,, véritable fétiche d'une société qui joue à se faire peur pour mieux se rassurer.
Face aux anciens, la tâche de nos créateurs paraît plus ardue, dans une société complexe, encombrée d'objets, comme asphyxiée —, Ghyslain Bertholon —,. Entre noirceur et ironie, ils affichent une capacité authentique à aborder l'inconnu, à accepter le relativisme des points de vue, là où le XVIIe siècle ne manipulait que des certitudes.
Les Prix de la Biennale d'Issy pour la promotion de la jeune création
Les Prix de la Biennale d'Issy pour la promotion de la jeune création
La Biennale d'issy permet à de jeunes plasticiens d'exposer auprès d'artistes reconnus du monde de l'art, comme Pat Andrea, François Boisrond, Robert Combas, Hervé Di Rosa, Philippe Favier, Aki Kuroda, Jean-Pierre Pincemin, Antonio Segui ou Vladimir Velickovic... Cette volonté de la Biennale d'Issy de mettre en lumière de jeunes plasticiens auprès de leurs pairs, se trouve confortée au fil des ans lorsqu'on retrouve nombre d'entre eux exposer en galeries à Paris, Bruxelles, Bâle ou New-York, ou lors de grandes foires d'art contemporain comme Art Paris au Grand Palais.
Sous l'impulsion de sa présidente, Chantal Mennesson, la Biennale d'Issy met en place plusieurs Prix valorisant le travail de ces jeunes artistes. Depuis bientôt dix ans, le Prix de la Biennale d'Issy, d'un montant de mille euros, est décerné à l'un d'entre eux : Tian-Bing Li (2003), Muriel Rodolosse (2005), Florence Reymond (2007)...
Les artistes de la Biennale d'Issy 2011
Mateo Andrea | peinture Pat Andrea | peinture et installation Fantine Andrès | dessin Emmanuel Barcilon | peinture François Bard | peinture Philippe Beaufils | installation Ghyslain Bertholon | sculpture Joël Brisse | peinture Elsa Cha | dessin Cyntha Chazal | sculpture Anne Chériez | dessin Robert Combas | peinture Charlotte Cornaton | vidéo Dany Danino | dessin Sarah Derat | sculpture Claire Echkenazi | sculpture Laurent Esquerré | céramique Philippe Favier | dessin Guy Ferrer | sculpture Bertrand Flachot | dessin et photographie Odile de Frayssinet | sculpture Anne Gaiss | peinture Gomme | photographie Lilianna Guderska | vidéo Elsa Guillaume | dessin Akira Inumaru | photographie Leonard Lamb | dessin Jörg Langhans | peinture Sylvain Lécrivain | sculpture José Man Lius | vidéo Maria Marquina | sculpture Patrice Martin | vidéo Azadeh Nilchiani | vidéo Laurent Okroglic | dessin Nicolas d'Olce | peinture Matthias Olmeta | photographie Julie Petit | installation Sébastien Pons | sculpture Axelle Remeaud | sculpture Christian Renonciat | sculpture Mathilde Roussel-Giraudy | sculpture Nicolas Rubinstein | sculpture Geoffroy Terrier | sculpture TTY | sculpture Didier Van Sprengel | peinture Amélie Weirich & Federico Fierro | vidéo
Et aussi...
Conférence « La vanité encore et toujours » par Stéphanie Bernardin, conférencière nationale, diplômée de l'École du Louvre.
Jeudi 22 septembre à 18h30
- entrée libre tous les jours sauf lundi et mardi mer-ven : 11h —, 17h | sam-dim : 14h —, 18 h
- Musée Français de la Carte à Jouer,
16 rue Auguste Gervais 92130 Issy-les-Moulineaux
www.biennaledissy.com
- Accès : Métro : Mairie d'Issy (ligne 12) Bus : 123, 126, 169, 189, 190, 289, 290, 323, Tuvim TRAM : Val-de-Seine (ligne 2) | RER : Val-de-Seine (ligne C)
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