Venez jouer avec moi
La Figuration narrative est un mouvement contestataire, né au début des années 60. Il rassemble, à Paris, des peintres, venus de toute l'Europe pour raconter leur vision du monde, en réaction à la peinture en vogue du moment : peinture abstraite ou Pop Art. Ils utilisèrent des moyens nouveaux, comme le collage ou l'acrylique, pour retranscrire le quotidien. Une exposition les met en scène au Grand Palais, à Paris, du 16 avril au 13 juillet 2008.
Joyeuse, l'exposition du Grand Palais est joyeuse ! Dès l'entrée, le ton est donné , les murs sont en couleur, jaune pâle, jaune foncé, orange, marron glacé, et les grands tableaux très colorés s'en détachent parfaitement. La circulation est intelligente , à la place de murs rectilignes à angles droits, des panneaux joints à angulations diverses, créant des corridors où l'on se promène , et au bas des panneaux, des retours de bois sur lesquels de larges feuilles colorées donnent des informations parfaitement lisibles. Le découpage par thème ou période est parfaitement compréhensible.
La visite s'annonce plaisante !
Dans les salles intitulées « Les prémices », beaucoup sont déjà là, avec un style bien particulier pour chacun : E. Arroyo l'Espagnol, O. Fahlstrom le Suédois, H. Télémaque le Haïtien, A. Recalcati l'Italien, J. Voss l'Allemand, Herro l'Islandais, V. Adami l'Italien, P. Klasen l'Allemand, etc. Sur des murs jaunes, la rupture avec l'art abstrait est consommée. C'est déjà joyeux, on sait que l'on est dans une autre peinture, on peut se raconter une histoire.
Copier n'est pas copier
Oui, il faut jouer dans les salles suivantes, « L'Art Du Détournement », où sont transposés avec beaucoup d'humour des tableaux célèbres , le nom de l'original n'est pas donné. A vos souvenirs ! Portrait de nain, d'E. Arroyo. De qui était l'original ? Facile. Grand Pas du St Bernard, La Maja de Torrejon » du même ? Facile aussi.
Danaé, de Cueco ? Allez, trouvez ! Boschflooded et Stalingrad », d'ERRO, c'est donné dans le titre. Este no escapa de l'Equipo Cronica, c'est plus dur !
Cela me renvoie à une exposition vue à Vienne, il y a quelques années, de Francis Bacon, avec ses portraits détournés du pape Innocent X d'après Vélasquez.
J. Monory, lui, squatte la salle suivante, bleu foncé/moquette violette, « La Peinture est un Roman Noir ». Ses peintures, toutes bleues- sa marque- filment l'univers du polar. Un rappel des polars en vogue ces années-là.
Bien sûr la politique est présente : sur des murs rouge sang, une critique de l'état du monde, de son formalisme, mais aussi de sa violence quotidienne et de ses guerres inutiles. G. Aillaud propose ses cages d'animaux, G. Fromanger le quotidien policier, B. Rancillac ses visions de guerre du Vietnam, Cueco un étonnant montage de Marx, Freud et Mao, P. Saul les coloris violents de sa vision maternelle et les scènes d'intérieurs de J. Voss ou d'ERRO, de P. Klasen et bien d'autres !
Tous ensemble
Il faut s'arrêter sur deux séries qui illustrent bien l'engagement politique, ainsi que la volonté de l'action collective.
Avec Vivre et laisser mourir, ou la fin tragique de Marcel Duchamp, G. Aillaud, E. Arroyo et A. Recalcati mettent en scène l'assassinat de Marcel Duchamp. Il s'agit d'une critique violente et dérisoire de tout ce que l'idéologie de M. D pouvait entraîner comme formalisme dans « l'Art Contemporain » qui naissait. Tentative ratée, semble-t-il, pour E. Arroyo aujourd'hui.
1960-1972, 12 ans d'art contemporain en France a été réalisé par la Coopérative des Malassis, qui comprend Cueco, Fleury, Pané et Tisserand. Il s'agit de 12 panneaux qui retracent la vie politique de ces années-là. Exposés au Grand Palais en 1972, devant le scandale, ils furent décrochés.
A voir, à lire
Figuration narrative Paris 1960-1972
-Galeries Nationales du Grand Palais
-3 avenue du Général Eisenhower, 75008 Paris
-www.rmn.fr
Figuration narrative
-Hors-série Beaux Arts éditions
-www.beauxartsmagazine.com
À lire
Figuration narrative
-Jean-Luc Chalumeau
-Éditions Cercle d'Art Paris 2005
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