Découverte de la ville lors de cette foire d'art
L'extraordinaire Tefaf, gigantesque foire internationale d'art qui a lieu du 15 au 24 mars cette année, peut être l'occasion d'une escapade dans cette vieille ville des Pays Bas. Suivez le guide qui a repéré pour vous les adresses de Maastricht.
Peu de gens connaissait le nom de Maastricht il y a 25 ans, le traité européen signé en 1992 et surtout la European Fine Art Fair ont contribué à la renommée internationale de cette cité du Limbourg hollandais. En un quart de siècle la foire a supplanté la Brafa belge et la Biennale des Antiquaires française, attirant quelques 73 000 visiteurs. Aujourd'hui plus de 260 galeries provenant de 20 pays se disputent le privilège d'exposer et de vendre à Maastricht.
La ville où mourut D'Artagnan
Maastricht, capitale du Limbourg, est la seconde ville du pays par son ancienneté mais aussi par le nombre de ses monuments historiques. Les Romains déjà érigent un pont au dessus de la Meuse dès les débuts de l'ère chrétienne.
Pendant le Moyen Age, la cité tombe sous l'emprise du Duc de Brabant et du Prince Evêque de Liège avant de devenir une ville de garnison quand elle est envahie par l'armée espagnole d'Alexandre Farnèse en 1579.
Après l'Espagne, c'est la France et les troupes du Roi Soleil (40 000 soldats) qui s'emparent de Maastricht vers 1673. Le célèbre mousquetaire d'Artagnan y mourut même en assiégeant ses fortifications. S'inspirant du pont fait pour sa ville, l'architecte maastrichtois créa sur demande du roi Louis XIV un « même » pont à Paris, le Pont Royal. 1678 est l'année où la ville revient aux Pays-Bas avant de repasser sous le joug français en 1794. Tous les habitants de la ville deviennent alors citoyens français à part entière.
Cette situation dure peu puisque Maastricht tombe à nouveau dans le giron hollandais en 1814 et y reste malgré le soulèvement des Belges en 1830. Dès 1830, la ville amorce son virage vers la nouvelle industrialisation. Sur une des places majeures de la ville, honneur est rendu par une grande statue à celui qui découvrit l'éclairage par le gaz, Jan Pieters Minckeleers.
Les fabrications de verre, de céramique existent grâce à l'achat d'une des toutes premières machines à vapeur. Pour les constructions, la marne est extraite sur la proche montagne, la Sint Pietersberg (dans ses entrailles, on a découvert en novembre 2012 le squelette d'un mosasaur, reptile marin préhistorique). Les activités minières, métallurgiques aussi ne sont pas loin.
Elles perdurent un siècle environ , mais après la seconde guerre mondiale il faut réfléchir à une reconversion qui est envisagée par la création d'une université. Tournée vers le droit, l'économie, les sciences sociales principalement, elle a très vite acquis une réputation de belle envergure, ancrant la ville dans son statut de cité européenne.
L'adoption de la monnaie, l'euro, en 1992 via le traité de Maastricht renforce cette image. Aujourd'hui, en liaison avec les provinces belges et allemandes, la ville de Maastricht est au nom des Pays-Bas candidate au titre de la capitale européenne de la culture pour 2018. La ville a été admise et qualifiée pour le second tour des élections. Le résultat final est a priori attendu en septembre 2013.
Différents quartiers et monuments historiques
Au cœ,ur du quartier commerçant de luxe, allez immédiatement à l'office de tourisme. Vous emprunterez probablement le pont principal qui remonte au XII ème siècle. Sur les plateformes aujourd'hui métalliques, il est un des passages obligés et piétons et bicyclettes s'y croisent en permanence.
Situé entre Kleine et Grote Staat, le Het Dinghuis est un bâtiment à voir puisqu'il fut le tribunal de justice de la ville jusque dans les années 1650. Typiquement flamand il en impose par sa hauteur, sa gaieté et son petit clocheton tocsin. Vous y trouverez toutes les informations pour circuler dans la ville : tout peut se faire à pîed, au besoin en bicyclette ou par voie fluviale sur la Meuse par bateaux. Assurément vous serez charmée par Maastricht qui est la moins hollandaise et la plus française des villes des Pays Bas.
Le Vrijthof est une des places les plus populaires. Il est connu des Hollandais pour sa fête culinaire en août et les concerts du célèbre enfant natif de la ville, le violoncelliste André Rieu. Mais pour le touriste, ce lieu a le charme d'une grande place aux nombreux restaurants et terrasses encombrées de fauteuils en osier. La place offre surtout une belle vue sur la basilique St Servais et sur l'église St Jean.
La première est encore catholique alors que la seconde a été convertie au protestantisme vers 1632. Imposante St Servais a été construite vers 1 000 au dessus du tombeau de St Servais. Ce saint là fut le premier évêque et le patron de la vielle. Outre sa pierre tombale, la piété populaire est importante ici car on vient adresser ses prières à Marie Etoile de la Mer, une vierge habillée de différentes robes, qui trône sur un autel à l'entrée même de l'église.
Remaniée, la basilique a plus d'intérêt pour son schatzkammer , son trésor, que pour l'édifice pur (voir néanmoins la chaire, les pierres tombales et les fresques murales). Longez le cloître et vous trouverez l'entrée du trésor, des trésors où l'or, l'argent et l'ivoire sont les matières premières qui dominent. Particulièrement admirables : le reliquaire et le buste de St Servais, les reliques et l'orfèvrerie ciselée et chargée de cristal de roche.
Reconnaissable par sa teinte rouge brique, l'église protestante de Saint Jean est d'une réelle austérité intérieure malgré un beau bâti gothique du XIII ème siècle.
Ce quartier là abrite de nombreuses boutiques de luxe et après avoir allumé un cierge à la Sterre der Zee, il est de bon ton de flâner entre les enseignes prestigieuses.
Le Museum Aan Het Vrijthof
A sa façade peinte en rouge vermillon, on reconnaît aisément ce charmant musée dont le bâtiment se trouverait plus aisément dans une ruelle de Prague qu'ici dans le sud des Pays Bas. Le lieu a servi de gouvernement ou habitation pour les Ducs de Brabant. Lors de leur visite à la ville, l'empereur Charles V et Philippe II ont eux aussi séjourné ici. Transformé en musée, l'adresse est ainsi le plus ancien bâtiment non religieux de la ville.
Dans une scénographie ludique et particulièrement bien réalisée sont présentés cinq siècles d'histoire culturelle du pays à travers des objets d'art décoratifs, du mobilier, des peintures. Aux collections permanentes s'ajoute deux expositions sur l'art et l'artisanat local qui changent chaque année. 31 43 321 13 27, www.museumaanhetvrijthof.nl
Markt est comme son nom l'indique la place du marché et le cœ,ur névralgique de la ville où se cotoyent des bâtiments historiques comme la mairie du XVIII ème siècle et des bureaux modernes pour l'administration.
Très animée la place est le rendez-vous de la jeunesse et la statue de Minckeleers éclairée d'un feu perpétuel est un point de ralliement facile que tous connaissent. Si des flammes éclairent en permanence sa statue, c'est pour rappeler que les rues ne furent plus des coupe-gorges grâce à son invention d'éclairage.
Légèrement excentré du cœ,ur bouillonnant commercial, le quartier proche de l'Hôtel Beaumont (près de la rue Wycker Brugstraat) est très charmant par l'étroitesse de ses rues. Institution locale, le Beaumont s'apparente au bâti français et en levant la tête vous trouverez des mascarons, des figurines sculptées dans la pierre, témoins de l'activité passée de la maison.
Plus de 200 « enseignes murales » décorent la ville et des parcours spécifiques existent pour les chercher. Ici, l'enseigne d'une meunerie, là un cheval tirant une charrue, là encore la présence d'une brasserie, là enfin l'étoile, symbole de Maastricht. A côté de la Pâtisserie Royale connue pour ses vlaais, tartes aux fruits, quelques antiquaires et des boutiques de bouche prisées par la population locale, le fromager pour acheter le terrible et fort en caractère Rommedoe. Celui-ci a une très forte odeur et est appelé par les Hollandais même Herfst Stink Kaas, fromage d'automne puant. A vous de voir si vous souhaitez ou non en acheter ! T'Rommedoeke, 31 43 321 77 28
Vestiges de la richesses des commerçants du Nord, les maisons bourgeoises sont soit en pierre blonde de tufeau, soit en pierre de taille grise soit en brique et la Renaissance mosane a laissé quelques traces par la présence de fenêtres à meneaux, de belles cours intérieures cachées par de grands porches.
Le quartier Céramique
Sur les bords de la Meuse, quittez le coeur historique de Maastricht et allez vers les nouveaux centres de vie et de commerce nommés Céramique . Le quartier doit son nom aux anciennes manufactures de céramique, porcelaine, verrerie installées là et qui ont progressivement fermées. Les vieilles usines ont été démolies et transformées en blocs d'immeubles résidentiels, professionnels ou commerciaux. Le principe a été de faire appel à différents architectes européens qui chacun ont imprimé leur marque personnelle sur une ensemble d'immeubles. Des formes très rectilignes, l'absence de végétation, l'uniformité architecturale dans un même bloc rendent les lieux assez sinistres : le monacal n'est pas bien loin. Néanmoins, les Hollandais considèrent le quartier comme calme et reposant, alors qu'il peut apparaître comme « stalinien de luxe » à un Français.
Bonnefantenmuseum
Dans ce coin Céramique, le musée est visible de loin par sa structure physique, sa forme d'obus dont la silhouette ressort dans le ciel et domine les environs. L'ensemble du bâtiment en forme de E est dû à l'architecte italien Aldo Rossi qui a créé ce lieu en 1995 permettant à la lumière de pénétrer partout. L'extérieur peut paraître austère, l'intérieur est par les puits de lumière très souriant. Le choix des œ,uvres est totalement éclectique : les sculptures anciennes peuvent se marier à des peintures contemporaines, l'ancien jouxte le nouveau, le 14 ème français peut côtoyer le 20 ème flamand.
Pendant la Tefaf et jusqu'au 11août prochain aura lieu une exposition très attendue sur la révolution russe de 1895 à 1917 . Une exposition unique de 90 œ,uvres provenant de la galerie Tretiakov de Moscou et du musée russe de St Pétersbourg constituera la plus riche collection d'art russe jamais présentée aux Pays-Bas. Des toiles de Malevitch et de Kandinsky sont attendues.
31 43 329 01 09, www.bonnefannten.nl
Quelques adresses sympas
--Les hôtels sont nombreux dans la ville, mais le rapport qualité / prix de l'hôtel Beaumont et sa situation géographique, à 150 mètres du célèbre pont qui mène au cœ,ur historique, en font un hébergement idéal pour le touriste qui désire faire tout à pied. Presque haussmannienne, sa façade le rend très français. Le Beaumont est une institution de la ville qui vient de fêter son centenaire. Faisant partie de la chaîne locale des tables gastronomiques, le restaurant propose
-Un menu spécial anniversaire. 31 43 325 44 33, www.beaumont.nl
-La sublime bibliothèque Selexyz dominicanen dans une ex église dominicaine : 31 43 30 40 130
--Un restaurant gastronomique installé dans l'église des Croisiers : Kruisheren restaurant , le cadre à lui seul vaut le déplacement si vous n'avez pas le loisir d'un repas, 31 43 329 20 20 (menu à 4 plats à 55 €)
-- Le Beluga : c'est « le » restaurant hautement gastronomique , design, il est installé sur les bords de la Meuse, prix élevés, 31 43 321 33 64
-- De Bobbel, une brasserie réputée connue aussi pour sa carte de vins et ses breuvages, des cocktails maison détonants. Petite carte pour quelques plats, 31 43 321 74 13
-- In den Ouden Vogelstruys : bar très chaleureux de la place Vrijthof que vous reconnaîtrez grâce à l'autruche en mascaron, connue pour la beauté du lieu qui constitue une des anciennes maisons de la ville, réputé pour son choix de bières, son ambiance musicale. Le café y est son soit-disant le meilleur de la ville ! 31 43 321 48 88
--Une adresse hétéroclite de chapeaux tenue par une anglaise tout aussi farfelue : Sheer Elegance, 31 43 321 35 77
--Un chocolatier belge , Benoît Nihant, 31 43 310 10 06
--Un torréfacteur de café mais aussi de cacahuètes, un beau choix de thés et de tisanes : Blanche Dael : 31 43 321 34 75
--La Bonne Femme : la cuisine n'y est pas la meilleure, mais la décoration des diverses pièces sympas et kitsch. La terrasse extérieure avec vue calme sur la Meuse mérite bien un cappuccino et en longeant les berges du fleuve vous trouverez un bar qui propose plus de 500 bières différentes. 31 43 321 68 61
--L'hôtel et restaurant Derlon : l'entrée n'est pas celle d'un hôtel, on accède directement dans le lounge entre les tables. Mais on a découvert des vestiges romains à Maastricht et on mange au sous-sol entre les restants de fouilles : inédit ! 31 43 321 67 70
--Pendant la Tefaf, une visite s'impose à l'office de tourisme car des billets de visites groupées, des thématiques spécifiques sont organisées. Pour accueillir les acheteurs et les badauds passionnés d'art, les horaires des magasins et des restaurants sont aménagés. www.tefaf.com
Longtemps partagée entre le Duc de Brabant et le prince évêque de Liège, la ville de Maastricht fut par la suite tiraillée entre l'Espagne, la France, les Pays Bas. Aujourd'hui par son modernisme et son dynamisme, elle dépasse tous ces clivages et veut devenir européenne à 100 % pour la culture tout du moins. La Tefaf, phénomène d'art de réputation mondiale, y contribue grandement.
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