A partir du 29 février
Après le succès sans précédent du film 'Intouchables', France 4 revient sur le thème du handicap avec une série documentaire inédite 'Dans la peau d'un handicapé', à partir du 29 février. Ce film, réalisé par Stéphanie Pelletier, prend le parti de se mettre à la place d'un jeune handicapé et de raconter ce qu'il vit.
Trois témoins, Hayssam, Julien et Eve, ont accepté de se placer dans la situation d'un handicapé. Audrey, une jeune paraplégique de 25 ans, les accompagne tout au long de cette expérience unique. Un film qui fait réfléchir au regard que l'on porte sur les autres, à l'attitude à adopter entre indifférence et nécessaire banalisation.
++++++
« On les croise souvent sans s'intéresser à eux, sans les regarder vraiment, par gêne, par peur aussi. Ils sont cinq millions de personnes touchées par le handicap en France, qui refusent désormais d'être tenues à l'écart de la société des “valides”. Des citoyens qui revendiquent comme chacun d'entre nous l'égalité des droits dans tous les domaines de la vie quotidienne. Des exigences qui peuvent surprendre, tellement elles semblent évidentes : la possibilité de prendre les transports en commun, d'accéder à une salle de spectacle ou à une discothèque, de trouver un travail, de fonder une famille..., de vivre tout simplement.
Qu'éprouve-t-on quand rien n'est prévu pour vous faciliter l'existence ? Que ressent-on quand on est l'objet d'une discrimination basée sur la différence ? Quel regard les autres portent-ils sur vous quand vous vous retrouvez coincé dans un fauteuil ? Et comment une personne valide peut-elle espérer le comprendre sans se mettre dans la peau d'un handicapé ? Voilà quelques unes des questions soulevées dans les quatre épisodes de cette série. »
Olivier Hallé
++++++
Audrey : belle, branchée, piercée
« Certains portent des lunettes, nous on porte un fauteuil »
Elle est ravissante, pétillante et respire la joie de vivre. Rien ne la distingue des autres jeunes femmes de son âge, à l'exception du fauteuil roulant dans lequel elle se déplace depuis cinq ans. « Je suis tombée de 2,5 mètres de haut en essayant bêtement d'attraper mon chat », explique-t-elle. De ce mauvais coup du sort qui l'a laissée paraplégique, elle ne relève plus que les « côtés positifs ». Après le choc initial, Audrey a vite décidé de se battre.
Aujourd'hui, parfaitement autonome, elle considère que son accident l'a rendue plus forte, plus combative. En servant de fil conducteur à cette série, elle souhaite « montrer que même si on a un handicap, ça n'empêche pas de voyager, de travailler, d'avoir une vie sociale, une famille ». En la voyant évoluer aux côtés des trois personnes valides que sont Hayssam, Julien et Eve, on ne peut que la croire.
Hayssam
Comment mettre 1 heure pour faire Étoile-Châtelet en métro au lieu d'1/4 d'heure.
Originaire du Liban, Hayssam habite à Paris depuis cinq ans. Pour cet étudiant de 28 ans, « Le handicap physique est la pire des souffrances [qu'il] puisse imaginer, pire que mourir parce qu'on a la conscience d'être diminué , et puis, ça ne doit pas être facile tous les jours de sentir le regard des autres se poser sur vous. » Hayssam, qui ne veut surtout pas « faire partie de ces gens qui regardent bizarrement les personnes différentes » a donc décidé de se glisser dans la peau d'un handicapé.
Dès sa première rencontre avec Audrey, il est subjugué : « Elle est époustouflante, extrêmement courageuse, communicative dans sa joie de vivre. J'ai oublié qu'elle était dans un fauteuil, j'avais une jolie fille en face de moi, pleine de vie , ça remplit d'espoir. » Rassurée par la sensibilité de Hayssam, la jeune femme lui propose de passer l'après-midi à se balader dans Paris... en prenant les transports en commun.
Rien de plus banal, a priori, mais aller de la place de l'Etoile à la porte de Versailles va les obliger à emprunter le RER, le métro et le tramway, et s'avérer une véritable expédition ! Un parcours du combattant que connaissent bien les personnes à mobilité réduite comme Louis Van Proosdij. Ce chef d'entreprise de 44 ans, devenu tétraplégique, explique qu'en France « un handicapé est (considéré) un peu comme un retraité, et par conséquent on ne comprend pas qu'il puisse avoir les mêmes contraintes horaires que n'importe qui. » Mais, pire que le temps perdu dans les transports, et les difficultés rencontrées pour rejoindre leur destination, ce sont les questions inconvenantes d'un passant qui ont heurté Hayssam.
Eve
Se sentir une star ou une martienne ? Entrez dans un magasin de chaussures avec un fauteuil.
Deux jeunes femmes dynamiques, face à face : l'une brune, l'autre blonde , la première en fauteuil, l'autre valide. Eve aussi a accepté de se retrouver dans la peau d'un handicapé. Cet agent immobilier de 32 ans avoue n'avoir « aucune connaissance en la matière », avant d'ajouter : « Je n'ai pas d'handicapés dans mon entourage. Ce que j'attends de cette expérience, c'est de me rendre compte des difficultés qu'ils rencontrent au quotidien. J'aimerais changer mon regard vis- à-vis d'eux [...] , je les plains, je ne vais pas au-delà, et du coup j'aimerais voir une autre facette... » Elle ne va pas être déçue !
Audrey lui a donné rendez-vous dans son appartement. Eve, qui s'attendait à rencontrer quelqu'un de « spontané et de super optimiste », est ravie d'avoir vu juste. En revanche, sa première impression du fauteuil la déstabilise : « Ça m'a fait un drôle d'effet, je ne me suis pas assise sur une chaise, c'est pas la même chose. Je ne suis pas superstitieuse, mais ça fait réfléchir , c'est un sentiment un peu compliqué à expliquer, mais j'ai eu un pincement au niveau de l'estomac. » Comment va-t-elle passer le reste de sa journée en compagnie d'Audrey à faire du shopping ? Une fois dehors, elle s'aperçoit immédiatement qu'avancer en fauteuil n'est pas de tout repos, et qu'on risque facilement de se salir les mains... Mais l'affaire se corse lorsqu'elles essaient de rentrer dans différents magasins. Non seulement l'accès est souvent difficile, voire impossible, mais les vendeurs semblent pour le moins indifférents aux personnes en fauteuil roulant. Pour Eve, faire des courses dans ces conditions s'avère « carrément contraignant. C'est fatigant et frustrant, parce qu'on ne peut pas aller où on veut [...] Mais ce qui m'a marqué c'est que, à chaque fois que j'ai eu besoin d'un coup de main, ça n'a jamais été l'employé d'un magasin, mais un passant qui est venu. »
Julien
Aller au cinéma, au concert, ou à un one man show n'est pas une partie de plaisir !
Autre jour, autre expérience. Après s'être promenée avec Hayssam, Audrey a donné rendez-vous à Julien, un animateur de colonies de vacances. Ils ne se connaissent pas et ne savent donc pas qu'ils ont deux points en commun : leur profession et leur âge. Avant de la rencontrer et de partager un moment de sa vie, Julien exprime ses craintes : « Une personne en fauteuil peut faire peur de prime abord parce qu'on ne sait pas comment réagir pour éviter de la blesser ou dire des bêtises, on a peur de faire des gaffes... » Le jeune homme appréhende également le regard des autres et le fait de se sentir « plus petit et plus vulnérable ». Après s'être essayé au maniement du fauteuil roulant chez lui, le voilà parti rejoindre Audrey dans un café parisien. Et là encore, elle est parvenue à le surprendre : « Je ne pensais pas qu'elle aurait cette joie de vivre et ce relativisme énorme vis-à-vis de son handicap. Je pensais qu'elle serait habillée en jogging et elle était en jeans, avec des petite bottines, maquillée, bien coiffée [...] , et puis, dès qu'elle m'a vu, elle a fait de l'humour : “Excuse-moi, je me lève pas” , j'ai trouvé ça génial, du coup ça m'a mis tout de suite en confiance. »
Entre les deux, le courant passe bien et ils ont l'air d'apprécier les mêmes choses. Audrey décide donc d'inviter Julien à assister, avec d'autres amis valides, à un spectacle dans une grande salle parisienne. Il accepte volontiers, mais est loin d'imaginer qu'il va être mal accueilli et obligé de passer la soirée assis dans son fauteuil très inconfortable, dans un emplacement réservé aux handicapés : « Un petit enclos, une place de parking, c'était la foire aux animaux, raconte-t-il, scandalisé que ce soit possible encore aujourd'hui ».
Le film 'Intouchables' enregistrait plus de 19 millions d'entrées au 24 février 2012
Par
Ajouter un commentaire