Exposition au Musée International des Arts Modestes
« Coquillages et crustacés » est une exposition consacrée à l'utilisation dans l'art modeste de ces matériaux souvent liés aux vacances.
Sète, ville singulière, pour plagier Paul Valéry, a eu une idée fantastique : offrir un musée aux arts modestes. C'est ainsi que le MIAM, Musée International des Arts Modestes, ne lésinons pas, a vu le jour en l'an 2000. C'est l'architecte Patrick Bouchain qui a redessiné l'espace dans un ancien garage. Coursives et patios permettent une circulation agréable. Dans la définition première qu'en donnaient les créateurs, « un objet d'art modeste c'est un objet extrait du quotidien, qui n'est pas vraiment utilitaire mais sollicite fortement l'imaginaire et suscite un plaisir esthétique. A cela s'ajoute des notions de simplicité, de bon marché et d'absence d'intellectualisme. » Et chaque année, une exposition à thème vient illustrer, éclairer cette volonté de mettre en valeur ces arts modestes, que l'on pourrait aussi appeler populaires.
En 2008, le thème est « Coquillages et crustacés ». Evidemment nous pensons à Brigitte Bardot qui chante la mélancolie de la fin des vacances. Mais nous en sommes loin de cette mélancolie. Très intelligemment, l'exposition s'articule autour des arts premiers ou ethniques, des créations d'artistes contemporains et des objets « souvenirs » de bord de mer. Quel est l'enfant qui n'a pas rêvé d'avoir une assiette en chromo, bordée de coquillages peinturlurés, avec inscrit en lettres d'or, « souvenir de Trouville, de Guingamp ou encore de Palavas-les-Flots ? » Sur le même modèle, il y a des poupées, des cendriers, tout un bazar kitch à souhait, qui vous réconcilie avec les frustrations de votre enfance. On peut voir aussi des faïences portugaises et françaises du XIXe siècle, kitchissimes elles aussi, qui vont du vide-poche ou de la salière à la cruche. On peut voir des poissons monumentaux aussi laids que des brochets. Mais là, nous sommes déjà à l'étage.
Prenons les choses dans l'ordre : la première vitrine est consacrée aux arts précolombiens et africains. On y admire parures, bracelets, broches, fibules, colliers en coquillages travaillés ou non. Certains objets viennent du Pérou, de Papouasie, du Congo, d'Amérique du Nord. Une mention particulière à une collerette papoue, appelée « kina », taillée dans la nacre et teintée d'ocre vif. Tous ces objets appartiennent à la collection de la linguiste Marina Yaguello , en parallèle, sont présentées des créations qui s'inspirent directement de ces objets millénaires. Les seuls matériaux utilisés sont bien sûr les coquillages, coquilles et nacre. Toujours au rez-de-chaussée, place est faite aux créateurs. Photos, peintures, sculptures, montages, vidéo, tous les modes d'expression sont mis au service de la mer. Paul Amar, vraisemblablement collectionneur impénitent de coquillages, les colle sur de la toile, les peint de couleurs claquantes. L'argent et le doré venant souligner le tout pour montrer un amiral Nelson naïf et manchot ou un Toutankhamon entre Femme et Homme. Mais à mon goût (ou plutôt mauvais goût), sa vierge de Fatima est un triomphe, drapée dans un premier manteau de coquillages et dans un deuxième de guirlandes lumineuses , avec sa gueule de travers, elle est à elle seule un miracle.
Un peu hébétée après cette Fatima clinquetaillante, j'aspire à plus de sobriété. Un homard seul dans sa vitrine appelle à l'aide. Mon goût culinaire pour ce crustacé m'a attirée. Le « Homard argenté » de Philipe Hortala est plus vrai que nature , son animal est constitué en grande partie de clés anglaises de tailles différentes. Du bon usage d'une boîte à outils pour un résultat artistiquement indiscutable.
Dans mon parcours, une œ,uvre m'a tapé dans l'œ,il, tellement elle est expressive. Il s'agit d'une tête d'homme toute pointue, pour laquelle ont été utilisés un gros coquillage et ses aspérités. L'artiste est Pascal Désir Maisonneuve, et sa sculpture datée de 1928.
L'exposition se termine par un recoin, légèrement plus obscur. Quelques toiles et objets gentiment érotiques rappellent que la coquille Saint-Jacques a souvent fait office de cache-sexe en peinture et en photographie. L'allégorie du printemps de Boticelli ne sort-elle pas nue d'une coquille. Certains coquillages et le sexe de la femme présentent quelques similitudes. Un avertissement comme il sied permet au spectateur non averti de rebrousser chemin, ou bien encore d'accroître ses connaissances. Il sera déçu, l'ensemble étant juste coquin.
Ainsi se termine un parcours en quasi scaphandre, dans une semi pénombre, propice à la rêverie et à l'imaginaire. C'est à Sète jusqu'au 16 novembre.
23 quai Maréchal de Lattre de Tassigny —, 34200 SETE
Tél : 33 4 67 18 64 00
Email : miam@miam.org / miam@ville-sete.fr
Site : www.miam.org
Par
Ajouter un commentaire